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1 - BIBLIOGRAPHIE - Page 12

  • 22 -« L’EXTASE ET L’AGONIE » à la recherche des « hommes extraordinaires »

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    « Michel-Ange est certainement un des talents les plus extraordinaires que le monde des arts ait pu produire, je le mettrai sans hésiter au même niveau que Mozart et légèrement en dessous de Shakespeare ; il est également un des plus difficiles à percevoir, ce qui est une des raisons qui m’a poussé à accepter le rôle »

    Dans cet extrait de son autobiographie «  IN THE ARENA » HESTON exprime un trait de caractère qui lui est propre, une volonté affichée de rechercher la difficulté dans la création de ses personnages, et si possible de jouer des «  characters »qui sortent des sentiers battus ; au milieu des années 60, tandis que beaucoup de ses collègues et non des moindres, les NEWMAN, Mac QUEEN, BRANDO , ont tendance à jouer des personnages contemporains en partie pour conserver leur public, HESTON lui, se tourne délibérément vers des figures historiques et politiques des siècles précédents, fasciné qu’il est par l’Histoire, les personnages de légende et d’une manière générale, ce qu’il appelle les «  extraordinary men », pas forcément pour se singulariser ou par un quelconque élitisme, mais essentiellement parce qu’il sent qu’il apprendra plus de cette expérience qu’en se contentant de jouer les «  Monsieur tout le monde »…

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    On pensera ce qu’on voudra de ses choix, mais force est de constater qu’ils sont le fruit d’un élan et d’une passion naturels, et en aucun cas celui d’un calcul économique méthodique de sa part visant à préserver son statut de star, d’autant que la plupart de ses projets du moment ne rencontreront pas le succès, et ce jusqu’au triomphe de «  PLANET OF THE APES » !

    Voici donc, quelques semaines à peine après la fin du tournage de l’éprouvant «  MAJOR DUNDEE », l’artiste embarqué dans une nouvelle aventure, à ROME , sur les lieux mêmes ou il tourna «  BEN-HUR »,ce qui lui procure d’entrée beaucoup de plaisir car il adore le pays, son peuple et sa culture, et n’en conserve que d’heureux souvenirs ; logé par la FOX dans une somptueuse villa de la Via Appia comprenant seize chambres, il va se sentir au départ plutôt seul, et assez gêné de se retrouver « traité comme Liz TAYLOR » ( !) et surtout sans la présence de sa famille qui ne le rejoindra que pour les vacances..

    Mais beaucoup de travail l’attend, avec pour commencer de nombreuses lectures afin d’en savoir plus sur l’artiste et l’homme qui va, comme souvent, finir par l’obséder totalement, un peu comme Van GOGH avait pu longtemps hanter Kirk DOUGLAS avant et après le tournage du film de MINNELLI : comparaison qui n’est pas déplacée, les deux comédiens, amis par ailleurs, ayant en eux cette volonté de tout connaitre sur les personnages qu’ils ont à incarner, ce qui pour HESTON passe par une approche quasi-universitaire et une totale immersion «  physique » dans son rôle.

    Le projet étant inspiré du roman d’Irving STONE dont le scénariste Philip DUNNE n’a retenu qu’une période de quatre ans consacrée à son travail sur la chapelle Sixtine, HESTON va se pencher, pour en savoir plus, sur une biographie écrite par VASARI, un ami du sculpteur ,écrite peu de temps après sa mort, et aussi sur de nombreuses lettres adressées à sa famille, tout cela pour comme il le dira lui-même, «  trouver Michel-Ange », comme il aura pu essayer de «  trouver » EL CID, Andrew JACKSON ou GORDON un peu plus tard..

    Déçu par les biographies qu’il va également lire sur le sujet, et considérant que dans toutes ces pages, «  l’artiste ne me parle pas, je n’arrive pas à mettre la main sur lui » HESTON va consacrer sa première semaine à discuter le rôle avec Carol REED, qui commence à le faire répéter, mais semble ne pas le convaincre dans son approche : le grand Carol, magistral metteur en scène de «  THE THIRD MAN » et «  ODD MAN OUT » n’est plus en effet le redoutable « puncheur » plein d’idées d’autrefois, et semble être devenu davantage un réalisateur qu’un créateur, ce qui va peu à peu indisposer HESTON, convaincu qu’il doit être poussé à se dépasser par les instructions de son director, et qui va constater que REED est trop gentil, trop bien élevé et trop «  british » pour le faire avancer ; jugement un peu dur quand on connait le pedigree de Sir Carol, mais étant donné le perfectionnisme du Chuck, rien de surprenant dans ce jugement sévère !

    En tous cas, livré donc un peu à lui-même quant à ses recherches sur l’artiste, HESTON va définir deux axes importants dans sa vision du personnage :

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    — Michel-Ange, selon lui, est avant tout un sculpteur, il n’a jamais aimé peindre, et la commande que lui a imposée le pape Jules pour la Sixtine fut pour lui un fardeau, un honneur et un labeur ou il s’est surpassé dans l’exécution, mais aucunement un bonheur artistique, car ce qu’il aimait avant tout, c’était sculpter du marbre…

    — Michel-Ange, malgré des éléments évidents mis à jour par certains de ses contemporains et lui-même dans ses écrits, n’était pas spécialement homosexuel, et ce fait non avéré selon HESTON n’a pas eu grande incidence sur son travail, car «  il n’était pas ému par ses contemporains, il n’a jamais eu d’histoire d’amour essentielle dans sa vie », vu que ce qu’il aimait avant tout, c’était sculpter du marbre…

    Autant l’analyse faite sur les « préférences artistiques » de l’artiste parait indiscutable historiquement, et sert d’ailleurs de base à tout l’affrontement entre l’artiste et le politique ensuite, autant celle relative à ses «  préférences amoureuses » peut faire grincer quelques dents aujourd’hui, et provoqua même en 1965 des remous compréhensibles ; à ce sujet, il est intéressant de noter que Burt LANCASTER avait été pressenti le premier pour jouer Michel-Ange et avait bien entendu, envisagé de le jouer totalement sous l’angle de l’homosexualité, ce qui correspond bien à l’état d’esprit de ce trublion libéral et sans tabous qu’était le grand Burt ; la FOX ayant décidé de ne pas s’engager avec lui dans ce projet et sentant que son projet de spectacle familial allait en prendre un coup, on va donc prendre avec HESTON le point de vue opposé, et même « inventer » de toutes pièces une romance avec sa bienfaitrice, la » Contessa » jouée d’ailleurs finement par Diane CILENTO, qui dira d’ailleurs plus tard s’être très vite bien entendue avec Chuck, mais avoir très vite perçu « qu’il n’allait jamais le jouer comme étant le cas le mieux documenté d’homosexualité de l’Histoire, et ça en devenait presque une blague sur le plateau » !

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    Soyons justes, avec le recul, il est facile de nos jours de moquer le choix délibéré d’HESTON d’éviter toute allusion aux penchants amoureux de l’artiste, et certains en ont du reste profité pour dénoncer « l’homophobie » de l’acteur, ce qui est par contre injuste et faux ; il est sûr que Chuck n’était pas attiré par le milieu « gay » d’HOLLYWOOD, mais il disait lui-même avoir beaucoup d’amis respectables et appréciés par lui dans cette communauté, avoir travaillé avec un bon nombre d’entre eux et n’être en aucun cas, homophobe, précision importante à notre époque de conformisme et de bien-pensance…

    Il se trouve juste qu’à l’époque, le choix d’une certaine neutralité dans ce domaine prévalant dans quasiment tous les films, il n’est pas choquant que REED et ses collaborateurs aient préféré s’intéresser à l’angle artistique et politique, et on peut difficilement, toujours avec le recul, leur donner tort vu le résultat.

    Concentré donc sur ce qui lui parait essentiel, l’approche créative déçue d’un sculpteur de génie obligé de peindre une chapelle qui ne l’inspire pas au début du moins, HESTON va se préoccuper d’obtenir la ressemblance la plus parfaite possible avec son modèle, malgré sa taille nettement supérieure, cherchant même à obtenir par le biais d’un maquillage saisissant «  un nez encore plus cassé que le mien au départ ! » une coupe de cheveux à la Florentine et une barbe inspirée d’illustrations d’époque, mais sans oublier que cette apparence physique, n’importe quel « hard-working » acteur peut l’obtenir, ce qui est le plus difficile, c’est de comprendre Michel-Ange, et transmettre cette vision au public…

    Et là-dessus, il va buter un bon moment, jusqu’à ce que, comme le souligne son excellent biographe Michael MUNN, il prenne conscience des efforts physiques intenses qu’a pu fournir l’artiste, lors de l’ascension du gigantesque échafaudage grandeur nature conçu par le studio dans l’immense pièce utilisée pour représenter la Sixtine, véritable « cœur » du film ; mis à contribution par les incessants va et vient nécessaires lors du tournage, il va mesurer que ses efforts journaliers ne sont rien en comparaison de ce que l’artiste a pu souffrir et éprouver lors de ses fatigantes séances , dans le froid, travaillant jusqu’à épuisement près de dix heures par jour, et l’aspect quasi –mystique de cette expérience va déterminer son jeu d’acteur pendant tout le reste du tournage : comparant l’ascension pénible de cet échafaudage, barbouillé de peinture et s’abimant la vue dans une lumière très précaire, il se voit comme un Christ face à son Golgotha, sinon comme un Sisyphe poussant son rocher…

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    Ces heures de tournage difficiles ,dans le cadre d’une réplique exacte de la Sixtine, le plafond de l’originale ayant été entièrement photographié puis reproduit, par un tour de force technique, aux dimensions adéquates, seront un moment particulièrement positif pour Chuck, car il va aimer le travail d’équipe qui y préside et surtout, trouver cela bien plus » reposant », curieusement, que tout ce qu’il vient de subir sur DUNDEE et 55 DAYS IN PEKING peu avant ; néanmoins, comme pour tout tournage, il y aura, si j’ose dire, quelques ombres au tableau…

    La première, c’est le temps perdu, préjudiciable aux yeux de l’artiste, par la production à cause de Leon SHAMROY, photographe attitré de la FOX, et qui n’est pas loin de se prendre pour la star du film ! L’homme en effet a la fâcheuse tendance à occuper le plateau pour régler ses lumières pendant de longues heures, faisant dire à certains farceurs sur le tournage qu’il est tout près de se prendre pour Michel-Ange himself… HESTON, furieux de voir qu’on gaspille un temps considérable à ne pas pouvoir répéter ni tourner, s’en prend d’ailleurs à Carol REED, trop gentil sur cette affaire et qu’il soupçonne de ne pas mener la compagnie d’une main assez ferme ! ( toujours dans la nuance, notre artiste !) ; mais rien n’y fait, et Chuck en voudra tellement à SHAMROY qu’il mettra son véto sans succès à son emploi pour PLANET OF THE APES deux ans plus tard…

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    Deuxième ombre au tableau, et celle-ci plus gênante, le comédien choisi pour incarner Jules, le pape guerrier et fin politique, rôle essentiel dans l’histoire, n’est autre que Rex HARRISON, british jusqu’au bout des ongles, avec les bons et les mauvais côtés ; Laurence OLIVIER, personnage moins excentrique, avait été pressenti au départ pour le rôle, et HESTON s’en faisait une joie, mais le grand Rex, tout à sa gloire récente d’avoir incarné le professeur Higgins de MY FAIR LADY avec le brio que l’on sait, va certes prendre le personnage du pape au sérieux, mais aussi faire montre d’une pétulance qui va vite embarrasser le très professionnel HESTON, un homme qui arrive à l’heure, sait son texte ,n’est jamais ivre et est bon dès la troisième prise ; HARRISON, malgré son immense talent, c’est plutôt quelqu’un qui arrive en retard, ne sait pas trop son texte, a généralement bien bu la veille et attend la quinzième prise pour être excellent…

    On imagine donc avec amusement les ruades impatientes du piaffant destrier HESTON devant attendre l’arrivée de son ô combien génial partenaire, et obligé de rejouer plusieurs fois une scène ou il pensait s’en être bien sorti, parce que Sir Rex a omis quelques lignes, prétextant avec mauvaise foi que les lumières étaient mal en place, ou que la canne que REED lui fait tenir, le déséquilibre dans ses mouvements…

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    Ce furent en tous cas à n’en pas douter de grands moments de comédie, sur l’écran et en dehors, et je me dois de citer à ce sujet le témoignage du regretté Venantino VENANTINI, qui tenait un petit rôle de nonce (bien payé ) dans le film ; il m’offrit en effet son analyse lors d’une conversation que j’eus avec lui  il y a quelques années, une rencontre bien sympathique et pour moi inoubliable :

    "En gros, nous avions là deux superstars désireuses de marquer leur territoire, l’une prête à tout donner du premier jet, regardant en direction du signor REED avec sévérité ou impuissance théâtrale dès que quelque chose ne tournait pas rond, l’autre prenant son temps, coupant une scène au moindre prétexte, réclamant un conciliabule avec le «  metteur » au grand dam de sa co-star dès qu’elle avait le moindre doute",  ce devait être quelque chose !

    Monsieur VENANTINI, cependant, m’avait quand même souligné que, dès lors que tout était enfin en place, la fusion du talent des deux acteurs opérait vraiment, et qu’il avait beaucoup appris de leurs moments de grâce, qui furent nombreux."

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    On ne peut que le confirmer en revoyant l’ouvrage maintenant, car, si la mise en scène de REED est effectivement belle, mais plutôt sage et académique à l’exception des scènes en extérieur dans les carrières qui ont vraiment du souffle, l’essentiel de l’impact du film provient du rapport entre les deux personnages principaux et donc des comédiens qui les jouent ; il apparait en effet que la clef du film , ce n’est pas essentiellement la vie de Michel-Ange dont il ne couvre qu’une partie, mais le rapport antagoniste entre l’art, la religion et la politique ; d’où le choix d’opposer l’artiste, qui se veut indépendant et ne peut se contenter d’être un pion au service de l’Etat, et le politique, qui a le pouvoir de faire vivre et travailler l’Artiste, mais en contrepartie lui impose ses exigences et ses préférences au nom de la raison d’Etat ; d’ailleurs, la subtilité du scénario de DUNNE fait qu’il n’y a aucun manichéisme dans sa vision des choses, chaque personnage a ses torts et ses bonnes raisons d’agir, le premier au nom de son Art et de son refus de se satisfaire d’une commande bâclée, le deuxième parce que la réalisation de cette ŒUVRE doit renforcer l’image et le pouvoir de l’Eglise, à un moment ou il sait que son autorité chancelle, et dans son esprit, peu importe que l’ouvrage soit parfait ou pas, il faut surtout qu’il soit livré à temps !

    Toute cette partie du film est remarquable, tant dans l’écriture que dans l’affrontement des deux egos opposés ,et pourtant finalement complémentaires dans la magnifique scène finale ou les deux hommes évoquent leurs rôles respectifs sur cette Terre, instant magique de grand cinéma ou Sir Carol sort un peu, et au bon moment, de son relatif académisme ; on serait même tenté de dire que HESTON, qui considérait à l’époque cette performance comme sa meilleure, n’est jamais aussi bon dans ce film que dans les moments ou il est confronté à HARRISON, car il faut la concurrence d’un redoutable « bretteur » comme l’Anglais pour lui faire donner le meilleur de lui-même, sa confrontation avec Olivier dans KHARTOUM sera d’ailleurs du même niveau.

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    «  J’aime jouer avec des Britanniques, ils ont pour eux cette culture, cet héritage shakespearien, ce goût pour l’excentricité et en même temps la justesse de ton et l’humour narquois qui nous échappent à nous Américains, et dont il y a tant à apprendre » ( IN THE ARENA)

    Le tournage terminé en Septembre, prêt à commencer THE WAR LORD qui sera un nouveau défi historique, Chuck est sincèrement persuadé que non seulement le film est très bon et son interprétation aboutie, mais qu’il va aussi «  fonctionner » auprès du grand public ;

    De plus, aucun problème de «  reprise en main » par la production du film, qui a souvent ruiné d’autres entreprises comme DUNDEE ou PEKING n’est à redouter, car la FOX et Sir REED étaient sur la même longueur d’onde ; l’insuccès flagrant du film à sa sortie, aux USA et même en EUROPE l’année suivante, va donc sérieusement ébranler l’artiste, non dans ses convictions, mais dans son cœur vu tout le travail entrepris et ses efforts pour vraiment «  sortir » Michel-Ange de lui-même, et on peut comprendre cette déception terrible ; peut-être l’époque ne se prêtait-elle déjà plus à des projets épiques ou historiques coûteux, ou peut-être son public n’arrivait-il pas à l’imaginer dans un rôle d’artiste et non de militaire ou de figure historique emblématique, il est difficile de comprendre les raisons profondes d’un tel échec, commercial s’entend, car THE AGONY AND THE ECSTASY reste un fort beau film , avec ses défauts et ses points forts…

    En fait, l’explication la plus terre à terre et certainement fondée est peut-être à mettre sur le compte du terrible Herman «  Iceman » CITRON, l’agent de l’artiste, qui déclara à son poulain après la sortie du film :

     

    «  Allons, Chuck , qu’est- ce que tu espérais ? Franchement, faire un film sur un type barbu et dépenaillé occupé à peindre un plafond ! Il faut que tu te remettes à faire des films que les gens auront envie d’aller voir ! »

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    12 MARS 2020 

    A CECILE .

     

     

     

     

  • 21 -SOYLENT GREEN , un classique très actuel…

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    EN 1973 , quand le professeur Frank BOWERMAN, autorité scientifique reconnue, accepte de servir de «  conseiller technique » pour SOYLENT GREEN, il considère sa participation comme nécessaire parce que, écrit-il, le film est destiné à offrir une «  vision réaliste de notre avenir » !


    Or en 1974, date de la sortie du film en Europe, si les politiques les grands pollueurs de la planète et les gros industriels sont parfaitement conscients des dangers que représente pour la planète l’ exploitation sauvage de ses ressources, le grand public est dans l’ensemble, globalement ignorant, ou peu informé en la matière ! L’écologie en est à ses balbutiements, le mouvement hippie, pacifiste et surtout «  anti-matérialiste » semble avoir atteint ses limites, et la notion de croissance et de pouvoir d’achat accru pour les citoyens des pays favorisés bien sûr, ne rencontre finalement que peu d’opposants de taille ; on nage donc , même si c’est facile de le souligner avec le recul, dans une inconscience presque totale des réalités écologiques, l’heure étant au combat des idéologies et non à la remise en cause du système …


    Et BOWERMAN, qui fait partie d’une élite consciente du fléau en devenir, n’y va pas avec le dos de la cuillère dans ses déclarations de l’époque !
    Il écrit, entre autres :
    « J’ai la ferme conviction que la croissance démographique sauvage s’ajoutant à la pollution de l’atmosphère et des mers constitue le problème le plus grave que l’humanité ait eu à résoudre ; si l’univers continue à être surpeuplé et pollué il en résultera une prolifération de crimes, de révoltes, et un état général de misère et de pauvreté  » 
    « A moins que des mesures soient prises, les commodités auxquelles nous sommes habitués, comme l’eau, la lumière, la chaleur ne seront plus disponibles, les sous-sols des métros deviendront de vastes dortoirs, des véhicules inutilisables encombreront les rues, et les transports aériens seront paralysés »
    « Nos réserves nutritives s’épuisent, nos océans se meurent, certains pays comme l’Inde ONT ATTEINT LE POINT CRITIQUE ! A NEW DELHI , 50000 personnes vivent dans la rue, les fourgons emportent tous les matins des centaines de cadavres, les statistiques concernant Bombay ou Calcutta sont encore plus effrayantes »
    Et il conclut par cette phrase à la dimension prophétique :
    «  En tant que spécialiste de l’environnement, j’insiste sur le fait que ces craintes ne sont pas excessives mais fondées, il est encore temps de faire marche arrière et d’agir ; dans le cas contraire, SOYLENT GREEN cesserait d’être un simple avertissement, il deviendrait l’épitaphe de toute humanité ! »

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    (Edward G. Robinson : Sol Roth)


    Long préambule chers amis, mais dont je ne m’excuse pas de le citer presque «  in extenso » car il souligne à quel point ce fameux SOYLENT GREEN cher aux amateurs de l’artiste HESTON, n’est certainement pas un film de plus dans sa longue carrière, mais une œuvre capitale, de par le contexte dans lequel elle a été conçue, et le «  message » politique qu’elle véhicule, au grand dam d’HESTON himself , qui disait détester cordialement les films à thèse, et va pourtant se donner totalement à ce projet ô combien dérangeant pour l’establishment….


    En effet, à l’époque ou commence le tournage de SOYLENT GREEN, l’acteur, qui n’en est pas à une contradiction près, vient d’en finir avec son allégeance au parti démocrate, dont il a été un représentant très actif pendant des années, pour apporter son soutien, certes conditionnel, au parti républicain et à son leader, le fameux Richard NIXON, dont il soutiendra la campagne ! Pour Chuck , son adversaire Mac GOVERN est certes «  un homme décent et estimable » mais il ne peut le suivre sur un sujet brûlant, la guerre du Vietnam , ou comment en sortir !


    Il considère en effet que NIXON offre plus de garanties que son opposant pour résoudre le problème vietnamien , et surtout qu’il est à même de redonner une meilleure image de l’Amérique et de ses forces armées ; c’est plutôt le romantique et l’ancien vétéran de la guerre du Pacifique qui parle, car son soutien à NIXON ne résistera pas au scandale du Watergate, quelques mois plus tard …


    Loin de nous l’idée de discuter ce choix politique, mais force est de constater qu’ approuver la politique d’un président soumis à la loi du marché et à la croissance à tout prix, pour en même temps se consacrer à un film mettant en lumière les dangers de l’industrialisation et ses conséquences, ne parait pas relever de la logique et de la raison pure…Mais tel est cet être étrange et tourmenté, finalement, qui aura tout au long de sa vie, surpris et dérouté ses détracteurs et parfois même, ses admirateurs !


    Revenons donc à la genèse de ce projet ; quand HESTON, suite au triomphe de PLANET OF THE APES et au succès , moindre mais bien réel de l’excellent OMEGA MAN, se retrouve propulsé au rang de mégastar de la science-fiction, statut qu’il n’aurait jamais imaginé occuper 5 ans plus tôt, il envisage essentiellement de revenir à la scène, mais il sait que le récent four subi par son ANTONY AND CLEOPATRA, pourtant admirable, a plus que fragilisé sa position de vedette ( il s’en moque) ET de décideur ( et ça, ça compte pour lui !) ; il se met donc en quête d’un nouveau projet, mais pas fou, constatant que le genre lui porte bonheur, va «  lorgner » du côté de la ( bonne) SF, en mettant la main sur «  MAKE ROOM, MAKE ROOM » roman «  coup de poing » de Harry HARRISON, dont le thème est la surpopulation !


    En effet , HARRISON a conçu son histoire dans un NEW  YORK surpeuplé en l’an 2022, ou 40 millions d’habitants survivent à part quelques nantis, sous le seuil de pauvreté, souffrant d’un manque chronique de nourriture, à tel point que les autorités n’ont plus qu’une solution cannibale pour les nourrir et avant tout, maintenir leur dépendance à la machine de l’Etat, surtout aux multinationales qui régissent le monde ! dans ce roman, HARRISON va donc bien au-delà d’un point de vue écologique, et remet en cause l’appareil politique et industriel qui mène le monde à sa perte…

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    (Harry Harrison)


    C’est d’ailleurs ce qui va retenir l’attention de Richard FLEISCHER, grand auteur de films de tous genres, quand il va accepter de réaliser le film tiré de son roman ; libéral convaincu , il va travailler avec son scénariste Stan GREENBERG autour du personnage du « détective » THORN et insister beaucoup sur la corruption policière, alors que HESTON va surtout, comme par hasard, se concentrer sur ce qui lui parait le problème majeur de ce siècle, la surpopulation, mais tout en la déplorant, il en restera là quant à sa critique du système…PDVD_002.png

    (Richard Fleischer dirigeant le tournage du film)


    On pourrait penser que ces visions un peu différentes du sujet traité vont rapidement en compromettre la bonne réalisation, mais il n’en sera rien, car deux hommes intelligents finissent toujours par trouver un terrain d’entente ; la description de la police, de ses manquements à la loi et de sa subordination totale au pouvoir ne sera absolument pas gommée, et le personnage de THORN, élément central du film, ne sera ni conçu, ni interprété comme un «  héros » auquel le public peut s’identifier, mais pour ce qu’il est vraiment : un homme simple, sans culture ni passé, cherchant à survivre par tous les moyens, incapable d’amour, conscient de la fourberie du système mais sans solution, volant sans vergogne des biens dans l’appartement d’un mort, tout entier à sa survie et à celle de son colocataire...

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                (Leigh TAYLOR-YOUNG & Charlton Heston)                                                                                   

     

    D’ailleurs, parmi les nombreuses critiques élogieuses qui suivront la sortie du film en France en Avril 1974, Gérard LENNE notera dans ECRAN : «  Charlton HESTON joue le rôle d’un flic intègre, et heureusement pas celui d’un Superman militaire comme dans LE SURVIVANT  » ( ce qui prouve qu’on peut comprendre un film sans rien saisir d’un autre…)


    A peu près en accord avec FLEISCHER sur le rôle et la manière de le jouer, HESTON va s’approprier le personnage, se concentrant sur son «  look » vestimentaire et l’apparence dégagée, ce qui est une constante chez lui : l’ « outside » avant l’ »inside » ! peu à l’aise dans les scènes sentimentales, il va, seule entorse à un scénario sur lequel il a droit de regard, demander à son « metteur » de limiter les scènes torrides avec sa partenaire ( excellente Leigh TAYLOR-YOUNG, à la fois belle et fragile) et ce sera sa seule réserve importante ; on retrouve là une forme de pudeur et de raideur WASP, due à ses origines de jeune homme des bois taiseux et pas à l’aise avec les filles, qui semble avoir suivi ce «  sex-symbol » malgré lui  dans ses rencontres à l’écran ; Miss TAYLOR-YOUNG dira d’ailleurs dans le commentaire audio du bluray du film, que «  Mr HESTON était très professionnel et courtois, mais redoutait les scènes intimes, et dans ce cas limitait le dialogue avec moi sur le plateau, par timidité sans doute »


    Un point qui va rassurer très vite HESTON quand au potentiel du film , c’est le casting de pemier choix réuni par la MGM : Edward G ROBINSON, son vieux copain l’Irlandais Chuck CONNORS, Joseph COTTEN dans un petit mais important rôle d’homme d’affaires par qui le scandale va arriver, et Brock PETERS sont tous des « pros » endurcis avec lesquels il n’y a pas de souci à se faire !

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                                   (Joseph Cotten)                                                                                    (  Mike Connors)

    Le Chuck va pouvoir » se lâcher » comme aux plus beaux jours dans les domaines qui sont son point fort, les scènes d’action, notamment celles qui se déroulent à la fin dans l’usine de production du fameux SOYLENT , ainsi que celle tout aussi marquante, de l’émeute populaire à l’annonce de la pénurie du produit en question ; il se sent à l’aise dans le rôle de ce policier à la fois honnête et corrompu, et ses échanges dans le commissariat avec l’excellent Brock PETERS, un grand ami qu’il a connu lors de la Marche sur Washington , sont parmi ses moments les plus justes dans le film , mais sans égaler les rapports complices avec un Eddie ROBINSON, au sommet de son art, qui interprète son vieux colocataire et bibliothécaire, Sol ROTH !

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    En effet, pour tous ceux qui apprécient ce film de nos jours, c’est davantage le rapport d’amour et de paternité qui unit ces deux personnages qui demeure «  le point émotionnel » le plus fort, bien plus que l’intrigue policière bien conçue mais sans surprises ; dés le début de l’ouvrage, ces deux êtres amenés à survivre depuis des années ensemble dans un minuscule appartement surchauffé, l’un comme enquêteur de police, l’autre comme informateur de celui-ci, semblent liés par une relation qui va plus loin que la simple cohabitation et la survie ; THORN, flic inculte et ignorant du passé, et SOL, érudit et ancien professeur d’université, se complètent parce que chacun possède quelque chose que l’autre n’a pas ; à THORN l’énergie, la force physique et la position sociale pour conserver une ( relative) aisance matérielle, à SOL la culture et la mémoire d’une époque «  où les gens étaient moches comme aujourd’hui ,mais où le monde était beau »


    Cette relation, toute en touches subtiles et sans gros effets sentimentaux est la clef de voûte sur laquelle le pouvoir émotionnel du film repose, et n’aurait pas été possible sans l’immense respect et l’affection qui unissaient ces deux acteurs en dehors du plateau ; Chuck était depuis longtemps un admirateur inconditionnel du grand ROBINSON, lequel en quarante ans de carrière, avait marqué le 7ème Art de LITTLE CAESAR à KEY LARGO en passant par DOUBLE INDEMNITY et HOUSE OF STRANGERS , autant de grands classiques qui ne l’avaient pas empêché de se trouver quasi «  blacklisté » en 1950 sans qu’on puisse lui reprocher quoi que ce soit !


    Revenu en grâce avec TEN COMMANDMENTS ( dû ironiquement, à un des metteurs les plus «  réacs » du milieu, DE MILLE !) il n’avait pourtant jamais retrouvé sa gloire d’antan, et désormais bien malade à l’approche de son 101ème film ( !) abordait SOYLENT comme son probable chant du cygne, ce que certains sur le plateau savaient, dont HESTON, qui sera pour lui un partenaire affectueux et attentionné pendant tout le tournage, célébrant son anniversaire avec émotion, et donnant à la toute dernière scène de sa carrière,, une force et un impact émotionnel qui en ont, fort justement, fait un moment désormais mythique du 7ème Art…


    Tout cinéphile ( et pas seulement tout admirateur d’HESTON) connait par cœur ce premier «  climax » de l’ouvrage, quand Sol ROTH, bouleversé par ce qu’il vient d’apprendre concernant l’origine du produit SOYLENT, décide de mettre fin à ses jours en se rendant au «  foyer » un lieu de haute technologie où le patient, généralement une personne âgée, se voit proposer une mort douce en visionnant des images du passé sur une musique de son choix ; un moment délicat à traiter, le mélo n’étant pas loin, mais qui dans le film passe comme lettre à la poste, grâce aux images superbes d’une «  nature heureuse »rassemblées par FLEISCHER, mais surtout grâce à la fusion qui s’opère à cet instant précis entre les deux comédiens, car en fait, on n’y joue plus la comédie, les acteurs sont deux hommes qui savent tous deux que l’un d’entre eux va réellement bientôt partir, et la distance entre fiction et réalité étant comme abolie, les vannes de la vraie émotion , sans jeu ni calcul ou chichis d’acteur, s’ouvrent, et de quelle manière !
    Vraies larmes de Charlton HESTON, qui oublie toute convention, toute retenue, pour exprimer ce qu’il ressent au plus profond, c‘est à dire la véritable et prochaine disparition d’un être cher et estimé, un de ceux qui lui ont donné envie d’art et de cinéma.

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    Visage bouleversé et toujours noble, étrangement nimbé de couleurs orangées à l’écran, d’un comédien de grande classe qui n’en est plus à « faire l’acteur », qui vit ces instants tout en laissant un monde imparfait derrière lui, et semble interroger le public, en même temps que le comédien qui reste en lui livre ses bouleversantes révélations à son ami…


    Après un tel sommet, obtenir un nouveau climax tout aussi fort, semble relever de la gageure, et pourtant Richard FLEISCHER va aisément y parvenir, car cet homme n’est pas n’importe qui ; grand spécialiste du thriller, et donc d’un montage nerveux et agressif, il va faire usage des qualités qui ont fait de VIOLENT SATURDAY et COMPULSION des classiques du film noir, et montrer dans la brève séquence de «  découverte » du mystère SOYLENT , à quel point son sens de l’espace et sa maitrise de l’action violente, évidents dans son chef d’oeuvre ,THE VIKINGS, ne sont absolument pas émoussés ; le moment ou THORN, après s’être introduit dans l’usine, se trouve stupéfait devant les « produits » fabriqués à partir de cadavres humains, suivi aussitôt, sans s’appesantir, par une séquence de poursuite ou li doit se débarrasser des contremaitres qui l’ont repéré, c’est du pur FLEISCHER, pour qui l’action est le moteur du film , maintient le spectateur en haleine, et surtout, selon ses propres termes, favorise la compréhension du message !
    Le message «  coup de massue » s’il en fût, nous le connaissons tous maintenant, puisque FLEISCHER nous assène bien sûr que si l’humanité continue sur cette pente, nous n’aurons plus comme solution de survie que de nous manger entre nous, à l’encontre de tous les préceptes chrétiens que le metteur en scène semble, Dieu étant souvent cité dans l’ouvrage, prendre quand même en compte, mais sans insistance particulière ; quand HESTON, meurtri et mourant après l’ultime course poursuite, ensanglanté et épuisé, explique à son supérieur que «  SOYLENT GREEN IS PEOPLE » et hurle la chose à tout un public consterné, on en arrive à un moment d’autant plus fort qu’il ne donne en aucun cas l’impression qu’une prise de conscience salutaire aura lieu ; excellent Brock PETERS, qui arrive par son regard et ses gestes, à NOUS faire comprendre que, bien qu’il ait saisi l’ampleur de la nouvelle, il ne fera rien pour la faire connaitre, car hélas, toujours à la solde du système !

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    (Brock Peters)


    Dans ce sens, par ce final à couper le souffle, FLEISCHER,  qui réalise ici finalement son «  ultime » film noir, va au bout de ses intentions de début de tournage : il n’y a aucune happy-end possible, le «  héros » meurt pour rien, ou presque, et s’il y a une solution à trouver, elle ne sera jamais individuelle, mais le fruit d’une prise de conscience collective , avant qu’il soit trop tard.
    Exactement ce que soutenait le professeur BOWERMAN, et aussi ce que soutiennent beaucoup d’individus sensés( généralement pas, c’est curieux, des politiciens) en ce premier quart du 21ème siècle…


    Certains esprits forts ont beau jeu, aujourd’hui, de considérer , de par l’évolution de la science-fiction actuelle, que le film a «  vieilli » citant les décors et les costumes comme étant « kitsch » les effets spéciaux comme «  dépassés » e la morale du film «  naîvement judéo-chrétienne » ;
    Pour ma part, j’aurais tendance à penser que très souvent, la science-fiction a plus « involué » qu’ « évolué », mettant certes l’accent sur des effets spéciaux et des décors souvent stupéfiants, mais au service de scénarii assez infantiles qui pourraient, comme dit Eddy MITCHELL «  être écrits par son chien »

    Richard H. Kline Picture

    (Richard H. Kline 1926-2018)


    Je ne sais pas si SOYLENT GREEN est donc «  kitsch » ou «  dépassé », mais je crois plutôt que le message qu’il délivre est toujours aussi fort et ô combien actuel, qu’il porte la marque d’un grand cinéaste, bien soutenu par d’excellents comédiens et une photographie de grande classe de Richard KLINE, et surtout et c’est bien l’essentiel, qu’il témoigne d’une vraie VISION , c’est-à-dire que le fond y prime la forme, et non l’inverse.

    C’est un très beau film.

    rose-rouge.jpgA MON ANGE, sur les hauteurs.

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    (Cette video que j'ai faite en filmant mon écran de télévision. Rien de plus émouvant que de regarder de nouveau, Charlton Heston bienveillant à l'égard de son ami Edward G. Robinson entouré par l'équipe du film et ses amis.) F.D.

  • BEN HUR : fiction et Histoire mêlées..

     

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    Tiré du roman de Lewis Wallace, Ben Hur (1880) a donné lieu à beaucoup de succès, au cinéma notamment...
     
    L 'auteur y présente une histoire fictive se déroulant sur un fond réellement historique, nous plongeant au début de l' empire romain, succédant à la République ...
     
    Sous le règne d Auguste, naît Jésus Christ et.... le héros de cette histoire.

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    Nous sommes en Judée, province romaine particulièrement difficile à gérer par l 'administration aux ordres de Rome. Région occupée où règnent de vives tensions entre les deux communautés. Tensions que les scènes du film montrent bien, par les phrases et les jeux de scène. Romains et Juifs vaquant à leur quotidien. Des autorités romaines nous sont présentées et nous enseignent l'idéal tout entier tourné vers le culte de l' empereur...
     
    Nous assistons à quelques moments de la vie quotidienne romaine, qui font les lois : galères,  triomphes, société, jugements, sévérité des condamnations. La force de Rome et ses luttes sont mises en évidence. C est aussi la mort du Christ, la naissance de ce qui va devenir le Christianisme sous le règne de Tibère...

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    Je dirai, pour finir, que ce très beau film est une splendide suite d 'images célèbrant l' histoire de Ben Hur mais aussi une des plus grandes périodes de l 'Histoire des hommes. 

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  • 20 - « EL CID » ou l’acteur face à la légende (3ème partie)

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    «  28 JANVIER 1961 : Quelque soit le résultat final de ce travail , on peut dire que ce film aura eu de la chance. QUATRE heures seulement après qu’elle ait complété ses scènes dans le film, Sofia a fait une chute et s’est démis l’épaule ; je lui ai apporté des fleurs et tous mes sincères regrets avant qu’elle prenne l’avion pour ROME, mais je n’ai pu m’empêcher d’avoir une pensée privée bien coupable, comme si je regrettais que cet accident ne soit pas arrivé un mois plus tôt » (JOURNALS)

    Ces propos de l’artiste au sujet de sa co-vedette, même s’il a pu les nuancer par la suite, illustrent bien à quel point ce tournage, du moins sa première partie, n’aura pas été un « tournage heureux », provoquant chez HESTON, outre ses réserves quant à l’attitude de sa partenaire, des doutes sérieux sur la valeur de MANN en tant que directeur du film ; il va même jusqu’à remettre en cause ses choix de mise en scène, fait nouveau chez lui, à plusieurs reprises, notamment son absence de fermeté devant le refus de Sofia d’accepter de vieillir à l’écran, alors que lui-même trouve normal et appréciable en tant que comédien, de devenir ce champion marqué physiquement par les batailles et les épreuves de la vie !

    En tous cas, toutes les scènes avec Sofia ayant été tournées, le Chuck, même insatisfait, va mettre toute son énergie dans les scènes d’action, persuadé que l’apport de Yak CANUTT comme directeur de la seconde équipe contribuera à relever le niveau du film ; amené par la nature de son personnage, à pratiquer beaucoup l’épée, il se retrouve tous les matins avec le maitre d’armes italien Enzo GRECO pour travailler au duel qui va l’opposer à Don GORMAS, ce qui fera l’admiration de MANN : « en dehors de ses attributs physiques, Chuck est un homme qui sait parfaitement manier l’épée, la lance, monter à cheval, il semble avoir été fait pour ça, et apprend à une très grande vitesse » ; ces qualités vont également lui servir lors du spectaculaire duel qui opposera le Cid au champion adverse Don MARTIN, puisque Joe CANUTT ne le doublera que pour sa chute de cheval, tout le reste du combat, dont le tournage prendra une semaine, étant assuré par l’acteur.

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    (Charlton Heston entraînement au duel avec Enzo Greco)

    Cet engagement physique du comédien pour vraiment exprimer toute la détermination et la passion qui habitent son personnage vont d’ailleurs tellement impressionner BRONSTON et YORDAN qu’avant même la fin du tournage, ils lui soumettront leur «  projet romain » qu’HESTON refusera d’ailleurs plus tard pour diverses raisons….

    Pendant que MANN tourne les rares scènes ou il est absent du champ avec Herbert LOM dans le rôle de Ben YOUSSOUF, à la place d’Orson WELLES qui s’est désisté, Chuck apprend à connaitre BABIECA, son cheval fétiche, refuse à regret la proposition d’OLIVIER de jouer BECKETT à BROADWAY, se passionne pour le travail de la seconde équipe qu’il trouve plus reposant que les scènes d’intérieur, bref, il s’occupe !

    Car le «  clou » du film se rapproche, c’est-à-dire la bataille de VALENCE, qui va opposer le CID à Ben YOUSSOUF et le faire rentrer dans la légende…

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    (Herbert Lom dans le rôle de Ben Youssouf)

    Pour cette séquence capitale, impliquant des milliers de figurants de l’armée espagnole ( au grand regret du libéral BARZMAN) le grand cascadeur Yakima CANUTT a été signé pour réaliser tous les grands mouvements et les combats eux-mêmes, ce qui fait du metteur de seconde équipe, un homme-clé d’une production d’une telle envergure !

    Or, assez curieusement, Anthony MANN semble alors prendre ombrage du prestige et de l’influence qu’exerce le fameux CANUTT sur la compagnie, d’autant que ce rude « westerner » n’a pas sa langue dans sa poche et insulte à tour de bras les cavaliers et fantassins espagnols qu’il accuse de manquer de conviction ; persuadé qu’il peut aussi bien faire, MANN va donc prendre en main la réalisation des combats sur la plage, ce qui peut en partie se comprendre, car il s’est plutôt bien tiré de la spectaculaire ruée de 500 chariots dans «  CIMARRON » ! malheureusement pour lui, le combat de VALENCE qui verra la victoire finale des Espagnols sur les Maures, c’est une toute autre histoire, et il va vite se rendre compte que sa technique consistant à filmer le maximum de plans d’ensemble, si elle marche pour les westerns, ne fonctionne pas pour un film comportant cent fois plus de figurants ; conscient qu’il n’obtient que des plans de foule à la limite du flou qui désespèrent même le très british chef-op Robert KRASKER, il va finir par jeter l’éponge, mais non sans avoir usé l’énergie de tous et l’argent de BRONSTON, et failli provoquer le départ de CANUTT, furieux, qui est quasiment rattrapé par la production alors qu’il s’apprête à reprendre l’avion pour LOS ANGELES !

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    (Photo Google)

    CANUTT va donc sauver ce qui peut encore l’être, en organisant de petites formations de combattants autour d’actions précises qu’ils vont répéter » ad nauséam » jusqu’à ce que chacun de ces groupes fasse un travail cohérent et puisse s’intégrer à l’ensemble, donnant enfin du rythme et du mouvement à ce qui ressemblait à une pagaille organisée ; cette affaire aura pris quatre semaines à tourner, et mobilisé une logistique sans précédent dans l’histoire du cinéma, 2000 fantassins et 1000 cavaliers, et même si à l’écran, le résultat parait encore aujourd’hui époustouflant, HESTON regrettera toujours que MANN n’ait pas laissé dés le début, les clefs du camion au fameux «  white Indian » du cinéma, qui sera plus tard de l’équipe de KHARTOUM , avec un grand succès.

    Il faut cependant tempérer le jugement sévère porté par Chuck sur son metteur en scène, d’autant qu’il ne l’a pas spécialement révisé plus tard, car si MANN a certainement commis des erreurs, son implication et sa passion pour le projet ne peuvent être mises en doute ; c’est lui qui aura choisi l’essentiel des décors naturels qui donnent sa magie visuelle au film, c’est lui qui aura soutenu sans arrêt BARZMAN dans sa vision d’une oeuvre historique mais humaniste, c’est aussi lui qui, de par sa formation théâtrale et sa sensibilité, aura su donner une dimension shakespearienne aux scènes opposant les deux fils et la fille du roi FERDINAND, tous excellemment interprétés par Gary RAYMOND , John FRASER et notre distinguée française à la voix unique, Geneviève PAGE !

    « Tony était un homme très doué, qui a fait de bons films, mais avec le recul, je ne crois pas qu’il était le bon director pour un film aussi difficile, réclamant autant de contrôle et de précision de la part de son metteur en scène ; les personnages et l’intrigue sont plus complexes que dans BEN-HUR, ce qui me porte à penser que si WYLER et MANN avaient échangé les rôles, BEN n’aurait pas été inférieur à ce qu’il est, mais EL CID aurait été le plus grand film épique de l’histoire du cinéma » ( JOURNALS, révision de 1978)

    Quelque soient les doutes de l’acteur sur les capacités de son réalisateur, force est de constater que les dernières semaines de tournage seront les plus efficaces, avec notamment le fameux duel, longtemps préparé, avec Don MARTIN,sur lequel MANN saura s’effacer, se contentant de filmer le début et la fin de l’action ,et HESTON tournera son dernier plan le 15 avril, pour se voir imposer par BRONSTON une séance de public relations à ROME, afin de satisfaire DEAR FILMS, co-producteur italien de l’œuvre, corvée à l’issue de laquelle il pourra enfin respirer, et repartir pour les USA après un séjour d’une semaine en FRANCE !

    Convaincu du potentiel commercial de l’œuvre, Chuck reste cependant, éternel perfectionniste, encore dubitatif quand à sa valeur artistique, même s’il trouve que l’essentiel de la captivante légende a été globalement bien capté à l’écran, mais on peut mettre ses doutes sur le compte de l’épuisement après six mois de travail dans des conditions souvent frustrantes ; il va donc ne plus fréquenter une caméra pendant six mois, et ne reprendra un tournage qu’en octobre, en Italie pour l’amusant,( et beaucoup moins crispant à réaliser) «  PIDGEON THAT TOOK ROME »

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    «  EL CID », comme chacun sait, fera plus que réaliser un box-office honnête, il sortira fin 1961 dans le monde entier, pour rapporter plus de 35 millions de dollars lors de sa première année d’exploitation, approchant les 50 millions l’année suivante, il va donc être un véritable triomphe, cimentant au passage la place d’HESTON au sommet de la hiérarchie des acteurs- décideurs, une position qu’il aura toujours souhaité assumer ; star, sûrement pas, mais artiste responsable de projets, c’est un rôle qui l’attire énormément et qu’il a enfin, après le triomphe de BEN-HUR et de celui-ci, l’occasion de jouer, avec on le verra des résultats commerciaux assez variables…

    Que reste t’il d’ «  EL CID »,un peu moins de soixante ans après sa sortie ?

    N’en déplaise au comédien, dont le jugement sur ses films n’est par ailleurs pas toujours partagé par ses fans, il s’agit bien d’un des plus grands films «  historico-mythologiques » de tous les temps, et on ne saurait rester indifférent devant le souffle épique qui anime ses plus belles séquences, le gout avec lequel MANN et son équipe ont su faire renaitre à l’écran l’Espagne médiévale, les passions humaines qu’il décrit et l’excellence d’un dialogue qui arrive à éviter les clichés et le pompiérisme propres à ce type d’ouvrage, sans oublier l’interprétation parfaite du rôle de RODRIGO par un HESTON véritablement possédé par son personnage…

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    Quand à l’image du CID mort, attaché à son cheval, semant la panique dans les rangs adverses et galopant à l’infini sur la plage pour entrer dans la légende, elle continue à resplendir dans la mémoire des cinéphiles, comme une inoubliable prolongation d’un Mythe éternel.

     

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    FIN .

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    A CECILE, qui aimait « EL CID »

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  • 19 - « EL CID » ou l'acteur face à sa légende … (2ème partie)

     

     

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    Il est étonnant de constater, près de soixante ans plus tard, qu’un projet aussi important que «  EL CID » sur le plan artistique et logistique, doté de surcroît d’un budget pharaonique pouvant faire craindre le pire en cas de dérapage technique ou humain, ait pu voir le jour avec autant d’approximations et de prises de risque ! Nous avons déjà évoqué dans la première partie, les soucis provoqués par l’absence d’un scénario digne de ce nom pendant la genèse du projet, mais voici qu’un deuxième obstacle de taille se présente à l’horizon, au moment où HESTON himself a enfin donné son accord et pris le bateau avec femme et enfant :

    BRONSTON n’a toujours pas sa CHIMENE !

    Or, pour des raisons à la fois commerciales et artistiques, le producteur a absolument besoin pour son « épic » d’une partenaire de poids ( si j’ose dire) pour son héros médiéval ; tout d’abord parce que le cinéma des sixties ne conçoit pas un film de cette ampleur sans que son acteur principal n’ait un « love interest », auquel cas le public féminin pourrait manquer à l’appel, ensuite parce que la légende du CID ne peut se matérialiser à l’écran sans le personnage de Dame CHIMENE, pièce essentielle de la tragédie.

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    Ben BARZMAN ayant charpenté le scénario en partie autour de la pièce de CORNEILLE, donne effectivement une grande importance dramatique au personnage de CHIMENE, car son amour-haine pour RODRIGUE permet selon lui de donner une vraie humanité à ses deux héros ; il est pour lui impossible de sortir du carcan du film épique, pseudo-historique, sans ajouter une dimension quasi-shakespearienne à l’intrigue.

    C’est d’ailleurs lui, et son influente épouse, qui vont insister auprès de BRONSTON pour qu’il persuade Sofia LOREN¹ d’accepter le rôle, en l’absence de toute candidate espagnole d’envergure suffisante ; et BRONSTON ne s’envole pour ROME qu’au moment ou HESTON arrive à MADRID, curieux timing quand on connait l’urgence du comédien à travailler le plus vite et le mieux possible, et ce premier retard n’arrangera pas les choses par la suite !

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    (Sophia Loren Carlo Ponti)

    Sofia est à l’époque en pleine gloire, ce dont va profiter son mari et producteur Carlo PONTI pour faire monter les enchères, et il sera un négociateur redoutable avec BRONSTON, qui a de toute façon besoin d’elle ! Compte tenu du récent succès de « LA CIOCIARA » de DE SICA, qui lui vaudra un Oscar de la meilleure actrice, LOREN ne peut que réclamer des conditions de contrat avantageuses, que l’on peut résumer ainsi  :

    1) Cachet mirobolant,( on parlera d’1 million de dollars, chiffre sans doute exagéré) supérieur en tous cas à celui d’HESTON, qui en prendra d’ailleurs ombrage…

    2) Temps de travail limité à 10 semaines

    3) Présence obligatoire de sa propre équipe (maquilleuses, coiffeur, traducteur)

    4) Droit de regard sur le script et toute modification jugée inopportune…

    Ces conditions peuvent sembler délirantes, compte tenu du fait que le rôle de CHIMENE est quand même moins important que celui de RODRIGUE, présent lui dans la majorité des scènes, mais il faut savoir que les expériences hollywoodiennes de LOREN avaient été désastreuses auparavant, notamment un tournage orageux avec Cary GRANT, et elle ne souhaitait pas retrouver le même problème avec HESTON, bref, sa crainte de se retrouver courtisée et harcelée par une autre «  major star » d’HOLLYWOOD était bien réelle !

    En fait, comme nous le savons tous, ces craintes vont s’avérer totalement injustifiées, et si des soucis vont très vite se présenter, ce ne sera pas sous la forme d’un conflit amoureux… car pendant que le « deal » se concrétise, HESTON bataille avec YORDAN pour améliorer le script, selon la formule «  mieux ne signifie pas bon ! » ce qui irrite profondément le pseudo «  screen-writer », persuadé de son côté que BARZMAN prend un peu ses aises avec l’aspect «  blockbuster » du projet, lui reprochant de trop développer le personnage de Dona URRACA ( Geneviève PAGE) au détriment de CHIMENE !

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    (Geneviève Page)

    On nage donc à ce moment en plein Odéon, car LOREN, depuis sa maison de ROME qu’elle ne quittera que pour le tournage, reçoit également le nouveau script et rentre dans une colère noire, car les changements apportés, selon elle, valorisent HESTON et diminuent considérablement sa présence à l’écran !

    On notera avec amusement que ces conflits d’égos surdimensionnés se produisent donc AVANT que le moindre plan ait été tourné, ça promet !

    Quant à celui qui doit tourner les plans en question, Tony MANN, il ne s’inquiète pas plus que ça, car il en a vu d’autres sur CIMARRON, qu’il vient de réaliser, où il a passé l’essentiel de son temps à empêcher Ann BAXTER et Maria SCHELL d’en venir aux mains ; MANN se concentre donc sur le choix des différents châteaux en Espagne ( c’est le cas de le dire) qui embelliront ce projet dans lequel il a toute confiance .

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    LOREN va finalement mettre un bémol sur ses prétentions artistiques quand elle a vent d’un possible revirement de BRONSTON, qui la joue à l’intox en annonçant que Jeanne MOREAU est pressentie pour le rôle, ce qui va l’amener, sur les conseils de PONTI, à parapher illico le contrat et s’envoler dans toute sa gloire pour MADRID, où l’attendent une foule de paparazzi déchainés et un Chuck très calme, qui se demande, comme d’ailleurs vis-à-vis de toutes ses partenaires féminines, comment tout ça va pouvoir se passer !

    A ce sujet, il est bon, quand même, d’éclaircir un peu les choses : si HESTON s’est souvent, du moins dans la première partie de sa carrière, montré difficile avec ses partenaires du beau sexe, ce n’est pas, contrairement à ce qui a souvent été écrit, par machisme ou par « autosuffisance virile », mais parce qu’il ne les trouvait pas suffisamment professionnelles et «  hard-working » ce qui n’est pas la même chose ; ainsi, il jugera dans ses «  JOURNALS » que LOREN est une  femme très estimable, d’une beauté tellement exceptionnelle qu’elle a peur que le moindre coup de vent puisse l’endommager ; peut-être est-elle davantage « star qu’actrice » ; il reconnaitra d’ailleurs s’être souvent trompé et avoir eu parfois un comportement désagréable,( notamment plus tard au sujet de Sofia), ce qui est tout à son honneur...

    En attendant, le tournage peut enfin commencer le 14 novembre 1960, après des mois de conflits de basse-cour, avec pour le freiner, déjà quelques impératifs de taille dus, il faut le dire, à l’entourage de LOREN : Sofia en effet, refuse les horaires standards proposés par BRONSTON, à savoir 8h-17h, car elle ne peut se présenter avec tous ses atouts qu’à partir de 12h, et encore, AVANT maquillage, autant dire que le travail ne peut commencer qu’à partir de 14h ! à la grande colère d’HESTON, le producteur va donc se plier à ces exigences, et ce sera le début d’un conflit interne durable.

    En effet, ce qui peut se comprendre, le Chuck est un «  early riser » un acteur qui aime travailler tôt, car c’est là qu’il pense être le plus vif, énergique et productif, et comme LOREN n’est pas prête avant le début de l’après-midi dans la majorité des cas, il doit supporter de longues heures d’attente, qui selon son biographe, l’excellent Michael MUNN, « sont parmi les rares choses qui le mettaient dans une vraie fureur, car il prenait les retards chroniques de sa co-star pour une marque de mépris envers l’équipe du film et lui-même » ;»

    En fait, et on le sait bien maintenant, Sofia était une bonne personne fort appréciée de tous, mais le respect de son image était pour elle capital, d’où les nombreuses heures consacrées à sa toilette et sa coiffure, ce qui a peut-être été au détriment de son jeu ; elle va se montrer un peu raide et sans profondeur dans la première partie du film, pour lui donner davantage de substance et de la force dans la deuxième, un défaut que les détracteurs de l’œuvre ont souvent pris plaisir à souligner…

    Description de cette image, également commentée ci-après

    (Raf Vallone)

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    Résultat de recherche d'images pour "john fraser actor"(John Fraser)

    La tension et disons-le, l’incompréhension entre les deux stars vont contribuer à un climat pesant et désagréable sur le plateau, car autant HESTON prend plaisir à travailler avec des acteurs qui connaissent leur texte et arrivent à l’heure, et dans ce domaine il n’aura pas à se plaindre avec les excellents Raf VALLONE, Gary RAYMOND et John FRASER, autant il n’arrive pas à « jouer la comédie » au sens strict avec Sofia, ce qui va rendre inefficaces la plupart de leurs scènes d’amour, élément pourtant crucial de l’ouvrage ! HESTON va d’ailleurs changer d’avis peu à peu au sujet de MANN, auquel il reproche très vite de ne pas diriger la compagnie d’une main assez ferme, et surtout de laisser Sofia faire à peu près ce qu’elle veut, quand elle veut ! le point culminant de cette incompréhension mutuelle va être atteint lors de la scène, pourtant fort belle à l’écran, de la mort du CID, rendue efficace uniquement grâce au savoir-faire de MANN, qui va alterner les gros plans de chacun des artistes et engager des doublures pour les champ-contrechamp, car à ce moment précis, même si les choses vont s’arranger en fin de tournage, les deux acteurs ne se parlent plus !

    Avec le recul, on pourrait en déduire que la cause de cette «  zero chemistry » entre les comédiens ,préjudiciable à l’œuvre, leur est totalement imputable, mais on peut nuancer cette impression maintenant ; il semble surtout que MANN, dans son désir avoué de «  faire le plus grand film historique de tous les temps » ait consacré davantage d’énergie à l’action et au Mythe qu’à la passion amoureuse, ne prenant pas le temps de mettre en valeur leurs scènes, habitué qu’il était à traiter davantage les rapports entre hommes dans ses westerns ; c’est d’ailleurs un reproche que lui fera HESTON plus tard, frustré d’être passé à côté d’un chef-d’œuvre, parce que, selon lui, «  ce film était la meilleure histoire, potentiellement, qu’un film épique puisse proposer, mais Tony, qui était un homme décent et un bon metteur en scène, a commis de terribles erreurs et est passé à côté d’une occasion incroyable de faire le meilleur film historique de tous le temps ; l’oeuvre a trop de personnages, et trop de «  sous-intrigues » qui nuisent à la force originelle du sujet, et si MANN avait concentré ses efforts sur les personnages principaux plutôt que sur les scènes d’action, il aurait fait mieux que ce qui est un très beau film, mais pas un grand film »

    Même si on peut approuver en partie ce jugement plutôt dur, qui peut se justifier en raison des évènements à venir que nous dévoilerons dans une troisième ( et dernière !) partie, on doit aussi dans ce cas, rendre en partie responsables des difficultés qui ont miné le tournage, à la fois Sofia et le Chuck lui-même , car s’il va tenir dans ce film un de ses plus beaux rôles et réellement donner à son RODRIGO une dimension mythique, il aura aussi par son attitude intolérante, compromis les chances de donner aussi une «  dimension humaine » supplémentaire à son personnage, de par le manque de chaleur et de sincérité donné à la relation RODRIGUE-CHIMENE …

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    Et il sera conscient de ses erreurs passées quand il déclarera à Michael MUNN :

    «  Comme disait Spencer TRACY, j’arrive au travail à l’heure, je connais mon texte et j’essaie de ne pas me prendre les pieds dans le décor ; c’est une sorte de névrose chez moi, je ne supporte pas les gens qui arrivent en retard, et ma réaction à ce sujet est parfois excessive, ce qui n’empêche pas ma névrose d’être meilleur marché que la leur ! mais je suis devenu plus tolérant depuis que j’ai travaillé avec Sofia, car beaucoup d’actrices sont en retard sur le plateau parce que les pressions sur leur physique sont supérieures à celles des hommes, ainsi que leurs angoisses, et cela se manifeste par une préoccupation excessive pour leur image, ce qui peut se comprendre, j’étais simplement beaucoup moins tolérant à l’époque, que maintenant »

    On peut imaginer Sofia lisant ces lignes et disant «  Ok, Chuck, je pardonne »

    ET c’est ce qu’elle a fait .

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    A SUIVRE …

    A CECILE pixiz-07-12-2019-14-08-17.jpg

     

     

     

     

     

     

     

    ¹ - Sofia : son prénom à l'état-civil, ou Sophia : son prénom au cinéma.