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1 - BIBLIOGRAPHIE - Page 9

  • EMOUVANT MESSAGE DE CLARISSE ...

    Demain 5 avril 2021, ce sera le treizième anniversaire du décès de Charlton Heston. Nous l'honorerons comme nous le faisons chaque année. 
    Le temps passe mais il n'efface rien de ce que fut notre plus grand acteur. Je pense même que cette année, un tournant s'opère et que tout doucement, Chuck semble revenir en grâce auprès du public et de certains médias. La partie n'est pas encore gagnée, mais le temps fera son oeuvre et un jour le monde reconnaîtra que si Chuck, comme tout un chacun a eu ses faiblesses, ses contradictions mais il fut surtout un homme et un acteur d'une telle dimension humaine que les générations futures apprendront à le connaître car il est forcément de ceux et celles qui ont marqué l'Histoire.
    En ce sens, j'ai voulu publier ici, l'émouvant hommage que lui rend notre jeune étudiante en cinéma, Clarisse. Son message a toute sa place ici. 
    Merci Clarisse pour votre grande sensibilité que je partage et que donc, je comprends. Jai pleuré moi aussi lorsque j'ai fait cette découverte et que je l'ai publiée. 
     
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    Il est difficile pour moi d'écrire ce post car j'ai les larmes aux yeux en y pensant mais faut que j'en parle, je ne peux pas garder cette douleur pour moi.
     
    À chaque fois que je pense que jamais je ne pourrai assister à la projection d'un film de Chuck, ça me fait mal au cœur.
     
    À chaque fois que je pense que jamais j'aurai l'occasion de le voir, j'ai un autre pincement au cœur mais là encore je me dis que je ne suis pas la seule fan dans ce cas...
     
    A chaque fois par contre que je réalise que Chuck est décédé alors que je n'avais que 5 ans et demi, là déjà pour moi c'est plus dur à accepter .
     
    Mais l'autre jour j'ai eu le cœur brisé en apprenant que Chuck a annoncé publiquement être atteint de la maladie d'alzheimer le 9 août 2002 devant des millions d'américains seulement 1 mois et deux jours après ma naissance...personne ne peut imaginer le mal que j'ai eu en apprenant cela.
     
    Personne ne peut imaginer à tel point il est difficile et douloureux pour moi de savoir que le seul acteur que j'admire au monde, que je défend bec et ongles est tombé malade et a connu ses pires années pendant que moi j'arrivais dans ce monde...
     
    C'est pour cela en fait qu'il est d'autant difficile pour moi de voir des photos d'un Chuck plus âgé de la période des late 90's-early 2000's...
     
    Même si le 5 avril c'est Lundi, je suis déjà en deuil pour Chuck, d'où cette photo de lui en noir et blanc, une photo publicitaire pour EL CID. Je partage cette photo parce qu'ici j'aime son regard, il est jeune, beau, dans sa période de gloire, cependant lorsque je regarde de plus près cette photo et c'est pour cela que j'ai choisi celle-ci j' aperçois une forme de petite tristesse dans ses yeux, son regard est adorable, noble mais triste à la fois.

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  • EXTRAIT DU LIVRE DE MARC ELIOT pages 426 à 429 (voyage de Charlton Heston en Chine)

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    En septembre, après avoir terminé le tournage de toutes ses scènes d'Un homme pour toutes les saisons aux studios Pinewood de Londres, Heston laisse la postproduction aux mains de Fraser et Snell et commence à se préparer pour le voyage à Pékin. Lydia va l'accompagner, ainsi que Herman Wouk, l'auteur de The Caine Mutiny, qui a également été invité par le gouvernement chinois après lui avoir accordé l'autorisation officielle de jouer la pièce. Avant leur départ pour Pékin, Heston et Wouk passent à nouveau de longs après-midi à discuter des subtilités de la pièce et de la manière de les transmettre aux acteurs, dont la plupart sont des professionnels, mais dont peu comprennent ne serait-ce qu'un mot d'anglais.

    Heston ne comprenait pas pourquoi le gouvernement chinois voulait monter une pièce sur une mutinerie, sans doute parce qu'il ne comprenait pas la culture de la République populaire de Chine. Pour les Chinois, le fait de voir un puissant capitaine de marine renversé par ses pairs était facilement compréhensible et étrangement satisfaisant. La cour martiale de The Caine Mutiny jugeait une autorité rebelle justement punie ; Queeg est un capitaine mais il est incapable de diriger son navire et doit être remplacé. Il devait être relevé de ses fonctions non seulement en raison de son état d'esprit, mais aussi pour préserver l'État. Aller à l'encontre du parti signifiait qu'il devait être fou.(page 426)

    Lydia est particulièrement enthousiaste à l'idée de se rendre en Chine. Grâce à ses photographies, elle s'était liée d'amitié avec l'aquarelliste d'origine chinoise Dong Kingman et le centenaire Jingshan Lang, largement considéré comme le père des photographes chinois, tous deux vivant aux États-Unis. Chacun de leur côté, ils l'ont encouragée à faire ce voyage pour découvrir l'extraordinaire beauté du pays et essayer de rencontrer et de photographier le plus grand nombre de Chinois possible. (page 426)

    Les Heston ont atterri à Pékin le 14 septembre 1988 à deux heures du matin et ont été conduits en limousine à l'hôtel Great Wall de Pékin. Ils s'étaient assurés d'avoir suffisamment de vêtements, de chaussures, de papier hygiénique et, ne sachant pas s'ils apprécieraient la nourriture chinoise, de nombreux pots de beurre de cacahuète. Ils sont ensuite descendus dans le hall et ont bu une bière Tsingtao avec le comité d'accueil qui les avait patiemment attendus malgré l'heure. Lorsqu'ils ont terminé, vers quatre heures du matin, les Heston sont retournés dans leur suite et se sont endormis.(page 427)

    Tôt le lendemain matin, après un petit-déjeuner composé d'œufs, de bacon et d'un bol chaud de riz conjee, Heston se rendit à la salle de répétition située dans l'immense et riche Théâtre d'Art Populaire, où le décor du tribunal militaire de Caine qu'il avait lui-même conçu, avait été construit,  était prêt à l'accueillir.(page 427

    (pages 428-429) :

    Dans son livre Beijing Diary, Heston écrit que tout au long de son séjour en Chine, il s'est senti un peu comme George Taylor, un étranger en terre inconnue. Cela lui a permis d'apprécier encore plus les libertés dont il jouissait en Amérique. Il était tellement enthousiasmé par ce qu'il pensait avoir accompli au cours de ce voyage dans ce qu'il percevait comme le cœur des ténèbres politiques chinoises qu'il voulait faire une autre version de la pièce, cette fois à Moscou, en russe, une version américaine moderne de Darkness at Noon (Ténèbres à midi).

    Cela ne s'est jamais produit, et il n'est jamais retourné en Chine. Au mois de juin suivant, le soulèvement des jeunes sur la place Tiananmen a éclaté et a amené Pékin et le parti communiste au bord de la révolution. Au fur et à mesure de l'arrivée des chars, les portes que Deng avait si prudemment ouvertes à l'Occident se sont refermées, et le gouvernement chinois a resserré son emprise sur le peuple afin de conserver le pouvoir. Il faudra plusieurs années pour que le traumatisme de Tiananmen commence à se dissiper et que le gouvernement chinois relâche son emprise sur les Chinois ordinaires.

    Heston a suivi tous les événements de Tiananmen grâce à une série de correspondances avec Barbara Zigil de l'Institut américain de Taïwan. C'est ainsi qu'il a découvert que les acteurs du film The Caine Mutiny, pendant une pause à Shanghaï, étaient retournés à Pékin et s'étaient rendus sur la place un après-midi pour soutenir le soulèvement, portant les vestes de production en satin noir que Heston leur avait données en cadeau. Lorsqu'ils sont retournés à Shanghaï pour terminer les représentations prévues, ils ont découvert que l'électricité avait été coupée dans le théâtre et qu'ils ne pouvaient pas continuer.

    Plus tard, lorsque les choses se sont calmées, Heston a essayé de contacter certains des acteurs de sa production et le département d'État lui a conseillé de ne pas essayer de joindre les Chinois avec lesquels il avait travaillé, car cela ne ferait qu'aggraver leur situation. Cela lui a donné froid dans le dos.

    "Je suis quand même content d'avoir fait la pièce (avec eux)", écrit-il dans son journal. "Je parie qu'ils le sont aussi".

    (traduction et publication avec l'aimable autorisation de Marc Eliot)

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    Traduit avec DeepL.com (version gratuite)

     

     

     

  • 31 - HESTON et De Mille, du chapiteau à la flibuste, histoire d’un conte d’HOLLYWOOD

     

    PREMIERE PARTIE

    Cecil B. DeMille Filmographie, - Réalisateur - Producteur - Monteur


    « J’aime bien la manière dont il m’a salué »…


    Apparemment, c’est ainsi que le grand Cecil B .De Mille répondit à sa secrétaire quand elle lui souligna qu’il n’avait pas aimé le film «  DARK CITY » dans lequel jouait pour la première fois à l’écran, un jeune inconnu du nom de Charlton HESTON,  dont il venait d’ apprécier le sourire et l’allure.


    Effectivement, «  DARK CITY » ne l’avait pas particulièrement ému, et il l’avait considéré comme un passable film noir comme HOLLYWOOD en produisait régulièrement à l’époque, mais le célèbre metteur en scène avait suffisamment d’expérience pour ne pas juger trop durement un comédien, surtout débutant, n’ayant pour lui que l’expérience du théâtre et de la télévision sur la côte Est, loin des  splendeurs de «  Tinseltown » …


    ET comme il faut bien qu’un conte de fées commence par un heureux hasard, c’est ce salut de la main du jeune acteur à son intention, passant en voiture devant les studios de la Paramount, qui va rester dans la mémoire du réalisateur et l’amener à réfléchir à l’éventualité de l’engager pour son futur grand projet «  THE GREATEST SHOW ON EARTH »

    SOUS LE PLUS GRAND CHAPITEAU DU MONDE - cineparade thierry 13
    Sans pour autant que le jeune comédien soit particulièrement en attente d’être choisi par le Maître, car n’ayant pas non plus été spécialement convaincu par ce film, il ne se sent pas encore à l’aise dans le circuit hollywoodien, et se verrait bien continuer sa carrière au théâtre, sa passion première, tout en décrochant des emplois à la télévision , laquelle lui a permis de jouer de nombreux rôles, de SHAKESPEARE à MAUGHAN ou STEVENSON ; il ne s’agit pas là d’un manque d’ambition,  mais comme son plus grand désir est de jouer tout en gagnant sa vie, l’attrait financier que représente un film  n’a pas forcément pour le moment, un poids déterminant dans ses décisions.


    Voici donc le jeune homme de retour sur la côte Est, pendant que le grand Cecil est très occupé sur la côte Ouest à préparer « le film le plus spectaculaire jamais fait sur le monde du cirque » ! et quand il s’agit de mettre en route un de ses »épics », rien n’arrête cet homme, aucune difficulté dans le montage financier ou le choix des comédiens ne vient tempérer son enthousiasme et son ardeur à toucher le public le plus vaste ; il faut dire  que le patriarche de la PARAMOUNT, qui a commencé sa carrière sous le règne d’Adolphe ZUKOR dès 1914 , en connait un rayon sur les goûts des spectateurs américains, puisqu’il n’a quasiment jamais connu l’échec, depuis sa première version des «  TEN COMMANDMENTS » jusqu’à son dernier succès «  SAMSON AND DELILAH » ; son obsession essentielle étant de «  faire du spectacle » mais avec des connotations religieuses et spirituelles très marquées, car ce fils de pasteur se veut également moraliste et éducateur. Il n’est donc pas surprenant qu’il puisse attacher beaucoup plus d’importance au «  box-office » de ses films qu’au jugement souvent très sévère des critiques ! 

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    (Cecil B de Mille consultant la Bible)


    Interrogé d’ailleurs un jour sur sa méfiance légendaire pour cette profession, il dira non sans humour : «  la plupart des critiques descendent mes films sans avoir eu à payer leur place, la plupart des spectateurs les aiment et  par contre , payent leur place, vous comprendrez donc à qui j’accorde plus volontiers ma sympathie »


    Ayant réussi à engager pour la durée du tournage le fameux «  RINGLING BROTHERS CIRCUS » pour la coquette somme de 250 000 dollars, De MILLE peut très vite, rassuré quant à la logistique considérable imposée par le projet, se consacrer à un aspect essentiel, le casting ; on a souvent médit, parfois avec raisons, sur les capacités de De MILLE à diriger ses comédiens, mais on ne peut nier qu’il ait mis dans ses choix de distribution autant d’énergie et de réflexion que pour diriger ses foules de figurants ou les placer dans un décor ; c’est plutôt dans sa conception même de « l’acting » qu’il faut parfois voir une forme de naïveté, car De MILLE venait du muet et était encore marqué par une certaine emphase dans l’expression propre à cette époque ; peut-être préférait-il accentuer le charisme visuel d’un comédien ou d’une comédienne plutôt que de se consacrer à leur faire travailler leur diction et garder une forme de «  naturel » ; quoiqu’il en soit, et jusqu’à la fin de sa carrière, ses films porteront sa marque, et la manière de jouer de certains de ses acteurs, souvent datée quand on voit ses films maintenant, provient davantage de son parti-pris esthétique que des qualités intrinsèques des  comédiens impliqués.

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    Menant très habilement sa barque, le rusé De MILLE va passer une bonne partie de l’année 1951 à faire «  mousser » son projet, annoncé à grand renforts de publicité, d’abord pour faire connaitre ses intentions, mais surtout pour inciter quasiment tous les acteurs et toutes les actrices en vogue à s’intéresser au film, car de toute évidence, un rôle dans une production aussi prestigieuse ne se refuse pas ; même Paulette GODDARD, qui déteste cordialement De MILLE pour son acharnement d’ordre politique contre Charlie CHAPLIN, va faire des pieds et des mains pour obtenir le rôle de la montreuse d’éléphants, lequel ira à Gloria GRAHAME, que l’auteur-producteur trouve plus sympa et surtout moins chère ! En effet, sans que l’heure soit encore aux restrictions de budget, De MILLE préfère largement choisir une distribution sans grandes stars coûteuses, à part bien sûr James STEWART, et il va donc s’orienter vers des visages connus mais sans plus, ou des visages totalement inconnus ou presque, et c’est là que le jeune HESTON va entrer en scène….


    Auparavant, De MILLE  va opter pour Cornel WILDE, qui sera ravi de pouvoir relancer sa carrière,  pour le rôle du « grand Sebastian » , acrobate malheureux dans le scénario , après avoir longtemps hésité à engager Burt LANCASTER, trapéziste de renom et comédien bien supérieur à WILDE, mais qu’il va finalement refuser en raison de son mauvais caractère et de ses opinions politiques à l’opposé des siennes ! James STEWART, seule grande star au générique, apportera sa touche d’humanité pour incarner un docteur accusé de meurtre et qui s’est réfugié dans le cirque sous les traits de l’Auguste de service. Quant à Betty HUTTON , qui disparaitra des écrans dés le début des années 60, elle  sera quant à elle le «  love interest » de Brad ,  le têtu et passionné  directeur du cirque…

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    Justement, quid du directeur du cirque ?


    Rôle effectivement capital, puisque ce personnage autour duquel se cristallisent toutes les passions et les jalousies, doit être selon De MILLE un dur, un autoritaire, et en même temps un type de bon sens auquel le public peut s’identifier, bref une sorte d’archétype de l’Américain parfait tel qu’il l’a rêvé et façonné depuis ses débuts dans la mise en scène ..


    Et un archétype pas trop cher si possible, ce qui réduit considérablement le champ d’action du metteur en scène, qui va pouvoir oublier les PECK, DOUGLAS et MITCHUM qui sont hors de prix, et réfléchir une deuxième fois à ce jeune qui l’avait si plaisamment salué un an plus tôt.


    Et ça tombe plutôt bien, car le jeune en question, contacté par son agent Herman CITRON, est justement disponible car encore sous contrat avec Hal WALLIS et PARAMOUNT, et sent quand même, qu’une proposition d’un homme de la stature artistique de De MILLE, c’est bien simple, ça ne se refuse pas !


    Le voilà donc embarqué dans le plus grand spectacle du monde, à jouer un de ces «  characters » qui vont un peu lui coller à la peau pendant les premières années de sa carrière : un type dur qui ne fait pas de concessions, pas toujours adroit avec les femmes ou parfois carrément macho, droit dans ses bottes mais un chouia rigide quand même, bref « a tough nut » que De MILLE va trouver parfaitement facile à diriger, puisqu’il s’adapte facilement à ses désirs ! en même temps, ce n’est pas très difficile, car HESTON va constater très vite que le «  metteur » donne très peu d’indications, ne cherche pas à améliorer le script ultra- écrit par 4( !) scénaristes, et se contente de rechercher une « chimie » visuelle pour donner de l’intensité et du relief à des répliques qui n’en ont pas toujours ; d’abord un peu désemparé par cette méthode ou absence de, le «  Chuck » va donc très vite s’adapter et tenir le moins compte possible d’une intrigue relativement mince, ou les antagonismes entre les personnages sont des plus téléphonés, parce qu’il a bien compris que le vrai sujet, ce ne sont pas les marionnettes qui s’agitent sur l’écran, mais bien sûr le Cirque lui-même !


    Il va d’ailleurs découvrir en De MILLE un personnage des plus complexes : très aimable et prévenant avec lui, il pourra se montrer très dur et cassant avec l’équipe technique, virant carrément quelques «  incapables » sur le plateau, ne tolérant aucune erreur dans le placement des figurants, mais s’arrangeant aussi pour faire travailler les «  extras » deux fois plus sur les grosses scènes de mouvement et de préférence avant NOEL, pour leur permettre de toucher un cachet supplémentaire ! «  He was the good cop and bad cop altogether » dira t’il plus tard pour «  résumer » la personnalité difficile de son mentor.

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    Ce tournage sera très physique pour Cornel WILDE et surtout Betty HUTTON en trapéziste, moins pour HESTON qui sera surtout concerné  par la scène très spectaculaire du déraillement du train, laquelle sera filmée sur le « soundstage » de PARAMOUNT, à tel point qu’avec le recul, Chuck jugera l’expérience amusante et excitante, sans qu’il ait vraiment eu conscience des difficultés liées au tournage ; «  c’était comme un jeu pour moi, j’avais l’impression  de travailler pour le plaisir, sans connaitre la pression » !


    La pression, ce sera plutôt pour l’auteur-producteur, car il a dû utiliser un budget considérable pour réaliser un film sur un sujet certes populaire, mais pas aussi familier pour le public que ses précédents péplums ou westerns dont il était quasiment certain qu’ils connaitraient toujours le succès ; « j’avais foi dans un projet qui célébrait une vision optimiste d’une forme de rêve américain, mais  j’ignorais si les Américains partageaient encore les mêmes rêves que moi »  dira t’il à un journaliste du New York Times après la sortie du film…


    Une sortie triomphale, qui mettra rapidement fin aux doutes du producer : très gros succès à sa sortie, le film se place comme la 2ème meilleure recette de l’année 1952 au box-office américain ; sabré comme il se doit par la plupart des critiques, il va néanmoins, ultime camouflet pour la presse bien-pensante, obtenir l’Oscar du meilleur film de l’année !  Comme souvent, Cecil B . De MILLE aura vu juste, en suivant jusqu’au bout sa ligne de conduite, sachant user de ses points forts et de son sens dramatique inné tout en ayant l’habileté de ne pas donner à l’intrigue trop d’importance du fait de sa relative faiblesse ; c’est d’ailleurs ce que, au moment de la ressortie de l’œuvre en Blu-ray près de 70 ans après sa sortie, on sera tenté de retenir au moment de «  juger » ce monumental exemple de la démesure et de la passion de l’ « âge d’or » hollywoodien..


    On peut donc considérer que, pour ses grands débuts dans l’univers de De MILLE, le jeune HESTON aura réussi au- delà de ses espérances :ayant choisi de jouer dans ce film sans stress particulier vu qu’en cas d’échec, il pouvait toujours retrouver le théâtre, il aura abordé cette énorme production sans complexe, et avec même finalement une( relative) insouciance, qu’il ne retrouvera pas dans certains de ses films ultérieurs, sans doute parce qu’il y aura pris davantage conscience de ses responsabilités ; et sans être exceptionnelle, sa prestation est globalement celle d’un «  naturel », à tel point  qu’une dame écrira peu après la sortie du film à De MILLE pour le féliciter d’avoir si bien compris le milieu et la culture du monde du cirque,  en ajoutant pour finir cette phrase que chacun pourra interpréter à sa façon :


    « J’ai  été épatée de voir à quel point le manager du cirque collait vraiment bien avec les vrais acteurs » ..

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    Mais s’il peut s’estimer comblé par cette rencontre importante avec l’un des géants d’HOLLYWOOD, le jeune Charlton qui n’est pas encore une star mais vient de faire montre de son potentiel, est loin d’imaginer ce que sa prochaine rencontre avec Cecil B . De MILLE va lui apporter…

     

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    A SUIVRE⇒

     

  • 30 - HESTON 1969 , de JULIUS CAESAR à THE HAWAIIANS: échecs, projets, espérances…

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    LE 31 décembre 1968 , Charlton HESTON passe le réveillon avec Lydia et ses enfants chez Tom GRIES, qui est devenu un «  proche collaborateur » sinon un ami, et qualifie la soirée de «  plaisante, même si ce n’est pas mon genre de sortie favorite » ; en effet, Chuck est connu pour ne pas raffoler des grandes « parties » du tout Hollywood et préfère quand il est convié, compulser les livres dans les bibliothèques de ses hôtes plutôt que de se mêler à la foule des invités, habitude tenace chez cet «  individualiste proche des autres » que définissait avec humour son ami Arthur MILLER …
    Il va cependant  durant cette soirée ne pas perdre de vue le côté professionnel des choses, puisque Tom GRIES, qui apprécie son jeu et sa personnalité, s’est vu confier par Walter MIRISCH  un projet important à gros budget, dont il espère qu’il lui permettra de devenir le cinéaste reconnu qu’il rêve d’être, même si sa carrière a commencé sur le tard : «  THE HAWAIIANS » d’après le best-seller de James MICHENER .
    Il est intéressant de noter que HESTON et GRIES  renouvellent leur association avec plaisir et beaucoup d’espoir, même si, paradoxalement, leurs deux précédentes collaborations, «  WILL PENNY » et «  NUMBER ONE » ont été deux «  fours » notoires et auraient pu les inciter, surtout l’acteur d’ailleurs, à passer à autre chose ; mais voilà, il se trouve que le HESTON de l’époque attache beaucoup plus d’importance à sa quête artistique qu’au succès commercial, et il ne voit donc aucune raison pour rompre sa relation avec GRIES ; celui-ci lui a offert deux de ses plus beaux rôles,  il lui en est reconnaissant, et l’accord de principe étant acté, le «  Chuck » reçoit le script  le 5 janvier 1969 .

     

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                              NUMBER ONE                                                     TOM GRIES                                               WILL PENNY LE SOLITAIRE 

               Et fidèle à sa tradition de «  perfectionniste compulsif » selon ses propres termes, il commence donc dés le 15 du même mois à harceler GRIES sur tout ce qui ne va pas dedans !
    En effet, le scénario de James R WEBB n’est pas exactement une adaptation du roman de MICHENER, pour la bonne raison qu’elle a déjà été faite par Georges ROY HILL en 1966, avec Richard HARRIS, éternel saboteur de tournages, et Max Von SYDOW ! il se veut plutôt une suite de l’ouvrage, ce que les Anglo-Saxons appellent un «  follow-up », sans trouver vraiment un équilibre entre les épisodes sentimentaux et familiaux inévitables d’une part, et la description  de l’évolution de la société hawaiienne vers 1880  d’autre part ; conscient très tôt du fait « qu’il y a trop de choses à raconter, trop de personnages à développer, plus que la durée du film ne le permet »( Journals, 15 Janvier) HESTON suggère à GRIES  de tailler allégrement dans l’aspect très politique du dernier tiers du script, et de centrer davantage le film sur le personnage de Nyuk Tsin, la jeune Chinoise arrivée à Hawaii sur un bateau « négrier » et qui deviendra la matriarche d’un clan prospère et respecté.

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    (Tina Chen dans le rôle de Nyuk Tsin)

    Constatons en passant que, loin d’être la star mégalomane que certains imaginent à tort, HESTON prouve ici une fois de plus que ce qui compte pour lui, c’est de se mettre au service du sujet abordé pour le plus grand bien du film, même si son rôle s’en trouve en conséquence réduit ; on est là aux antipodes du comportement de beaucoup de ses contemporains, pour lesquels le temps de présence à l’écran doit quasiment être chronométré…Non, lui au contraire, estime que son personnage doit pouvoir s’effacer au profit de la description d’une communauté chinoise qu’il estime plus intéressante ; s’agit-il de sa part d’un éventuel détachement vis-à-vis d’un film qu’il n’entreprend « qu’à moitié convaincu, ce qui est une faute de ma part » ( Journals,17 juillet), l’avenir prochain le démontrera.

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    Whip Hoxworth le Maître des Iles, va s'humaniser.....

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    En attendant ce tournage qui ne l’excite pas spécialement, HESTON se passionne par contre pour le projet JULIUS CAESAR, suggéré pour lui par le jeune «  boy producer » Peter SNELL, et dont on peut dire qu’il est le principal responsable, ayant eu voix au chapitre sur pratiquement tous les aspects hormis la réalisation ! Il est effectivement dans son élément sur ce tournage, en plein «  actor’s country » plein d’espoir, convaincu du moins au début que ce sera un grand film shakespearien, pour se rendre compte très vite que tout ça ne tourne pas rond : le refus de WELLES de jouer Brutus, son remplacement par le catastrophique Jason ROBARDS, la mollesse relative de Stuart BURGE à la mise en scène vont être pour lui une source de frustration difficile à évacuer : «  the movie was ok, but ok is not enough for Shakespeare ! »

    Ce qui ne l’empêchera pas , tout à son idéal artistique, de se lancer sur l’instigation de SNELL, sur le projet «  ANTONY AND CLEOPATRA » encore plus fou et grandiose, en partie parce que sa prestation dans le rôle d’Antony lui a plu ( et ce n’est pas souvent ) et surtout parce qu’il porte en lui une véritable vénération pour cette pièce admirable depuis sa jeunesse ; l’insuccès commercial de JULIUS ne sera d’ailleurs pas  un frein à son entreprise, même s’il s’inquiète avec quelque justification de son avenir..

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                                                                                                (Charlton Heston et Peter Snell) photo :

    http://www.britishlion.com/mobile/peter-snell-producer.shtml


    «  Dans cette ville, (Hollywood) il semblerait que les décideurs soient plus enclins à chercher à faire des affaires qu’à chercher à faire des films ; je suis allé chez MGM discuter mon maquillage pour THE HAWAIIANS avec Bill TUTTLE, chef de ce département, et c’était déprimant de constater que pas une caméra ne tournait dans le studio ! si BEN-HUR fait un profit sur sa ressortie ce été, ça servira à payer la note d’électricité d’un studio vide » (Journals,21 mars). Propos bien amers mais tout à fait réalistes : le «  studio system » est en effet en train de mourir de sa( pas très) belle mort, et les nouveaux réalisateurs comme HOPPER,COPPOLA,LUCAS et SPIELBERG se profilent à l’horizon, celui d’un cinéma volontiers intimiste favorisant les nouveaux (jeunes) visages, et HESTON, tout en admettant que les temps doivent changer, se demande déja comme beaucoup de vétérans ayant commencé leur carrière dans les années 50, quelle pourra bien être sa place dans ce « nouvel Hollywood » …
    Avec son très gros budget, son sujet historique très fouillé et la présence de Chuck comme «  valeur marchande » le projet MIRISCH de THE HAWAIIANS semble en effet appartenir à un autre cinéma, une autre époque ; l’équipe technique est de premier ordre, avec les excellents Lucien BALLARD pour la photographie et Henri MANCINI pour la musique, le cadre d’Hawaii splendidement approprié au succès du métrage, mais quelque chose ne «  fonctionne » pas, et c’est bien le manque d’enthousiasme du Chuck sur le plateau ; pourtant, le personnage qu’il incarne, ce Whip Hoxworth capitaine de navire et disons le quasiment trafiquant d’esclaves d’origine chinoise, à la fois antipathique et capable de revirements au fil de l’histoire quant à sa manière de vivre, est tout à fait taillé pour lui, qui adore les caractères impossibles de « machos » apparemment irrécupérables ! Il avait parfaitement réussi son « King » Rowland dans le très bon «  DIAMOND HEAD «  en 1962, film situé également à Hawaii d’ailleurs, mais dans cet opus, il ne trouve selon ses propres termes «  pas grand-chose à jouer » sans doute parce que le couple chinois formé par MAKO et Tina CHEN lui parait infiniment plus intéressant que celui quelque peu artificiel, qu’il forme avec Géraldine CHAPLIN en épouse névrosée un peu tête à claques il faut bien le dire ; son personnage va néanmoins s’affirmer dans la dernière partie du film ,ou il interprète un Hoxworth vieillissant qui peu à peu s’humanise, et dont les rapports avec l’excellente Tina CHEN sont empreints de finesse et de complicité… 

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                                                    Mako                                                                                Tina Chen
    On peut même ajouter que toute la dernière partie, qui privilégie cette relation et propose également un incendie spectaculaire du bazar d’Honolulu, ressemble enfin à du très bon GRIES, même si assez peu charitablement, HESTON considérera que : «  Tom était un peu dépassé par l’ampleur du budget, et n’avait pas l’autorité nécessaire pour mener le bateau au port » 
    Petite pique qui relève peut-être de la frustration de s’être lui-même embarqué sur ce frêle esquif, en tous cas GRIES lui-même, dont il conservera l’amitié, n’hésitera pas à dire :
    «  J’ai été passablement ennuyé par la manière dont Chuck a abordé et le film ,et le rôle ; il était tout à la préparation de son Antony à l’époque, et franchement, il avait cela en tête beaucoup plus que THE HAWAIIANS »
    Il est bien connu que lorsque l’acteur principal et le metteur en scène d’un film tombent d’accord au moins sur une chose, c’est-à-dire que l’autre n’était pas à son meilleur niveau sur le tournage, le résultat final est rarement probant, et THE HAWAIIANS, qui aurait pu être un grand film dans d’autres conditions, n’est au bout du compte qu’un bon film d’aventures, bien réalisé certes, mais  plutôt bancal parce qu’un peu « éparpillé », sans véritable ligne directrice ; HESTON écrira à son sujet, peu après le tournage :
    « J’ai enfin fini ce film, dont je reconnais la valeur, même s’il s’est trouvé en sandwich entre deux projets  moins commerciaux qui me tenaient à cœur. Savoir s’il marchera est toute la question, mais j’ai appris à essayer de ne pas y répondre, du moins à ce stade ; je peux dire qu’il me parait maintenant plus réussi que je le pensais au départ, plusieurs des performances sont meilleures que je croyais, notamment les deux rôles chinois principaux. Tina et MAKO sont excellents, ainsi que Géraldine et Alec (Mac COWEN) ; je pense être ok, mais je n’en ai pas encore vu assez pour l’affirmer »
    On peut ressentir une forme de modestie dans ces propos, et aussi une façon de s’effacer un peu, comme si l’Artiste était conscient qu’il n’a pas livré loin s’en faut sa meilleure performance, et le fait qu’il ait ouvertement critiqué son travail ensuite est tout à son honneur ; quoi qu’il en soit, quand le film sortira en juillet 1970 ( et en France au printemps 71) sous le titre «  LE MAITRE DES ILES »  il ne sera pas le succès que son gros budget laissait espérer, ne faisant que 2 millions et demi de dollars au box-office américain ( selon le biographe Mark ELIOT) et ne rapportant que le quart de la somme qui lui aurait permis de rentrer dans ses frais, un nouveau «  flop » hélas, qui en suit deux autres, NUMBER ONE et JULIUS CAESAR .

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    Charlton Heston et Géraldine Chaplin

    Cela commence à faire beaucoup pour un homme qui, pas loin de la cinquantaine, constate que le nom HESTON n’est plus une garantie de succès automatique, et que ces échecs risquent de porter préjudice à ce projet ANTONY qui lui tient tant à cœur…
    « Il est important pour un acteur de ne pas être associé à trop de gros échecs ( big losers)  car si vous êtes la star d’un film qui fait un énorme bide, ça devient vraiment serré ( your collar gets tight) et les banquiers commencent à dire : «  ah oui, c’est le gars qui a joué dans ce film qui n’a pas fait un rond »
    Voilà donc dans quel état d’esprit se trouve l’Artiste en cette fin d’année 1969, conscient que, pour la première fois de sa carrière, il n’a été satisfait par aucun de ses films, ni commercialement, ni surtout artistiquement, et c’est à ce niveau qu’il mesure son échec ; auparavant, le résultat très mitigé de KHARTOUM ou de THE WAR LORD avait pu le blesser, mais une forme de compensation se trouvait dans sa certitude d’avoir contribué à deux beaux films , or là, ce n’est pas le cas ! 

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    (George Gordon dans KHARTOUM - Chrysagon de la Cruz dans LE SEIGNEUR DE LA GUERRE - Robert Neville dans OMEGA MAN)


    Homme intelligent et combatif, il va tout faire pour trouver la parade et rechercher la réussite dans ces deux domaines, et il obtiendra sa récompense l’année suivante avec THE OMEGA MAN, qui le comblera sur les deux plans, et surtout ANTONY, même si celui-ci  sera surtout un accomplissement artistique …
     Un nouvel épisode du parcours chaotique et passionnant d’un homme décidemment peu ordinaire !
    Pour mes chères amies Hestoniennes, qui je pense se reconnaitront…

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  • 29 - HESTON 1966 , du VIETNAM à « COUNTERPOINT »

    CONFERENCE DE PRESSE A TOKYO (1966)

    (Charlton Heston Co F 2nd Batt Jan 20th 1966)

    S’Il est un personnage dans la carrière de Charlton HESTON que l’on évoque rarement, mais qui a eu dans l’ombre une influence considérable sur sa carrière, c’est bien son agent, le redouté «  Iceman » Herman CITRON …


    En effet, le célèbre agent artistique s’était occupé de gérer les affaires de l’acteur depuis ses débuts, et celui-ci lui était reconnaissant d’avoir eu foi en lui, même lorsque le succès n’était pas encore au rendez-vous.


    Persuadé que son poulain avait toutes les qualités pour devenir une superstar, CITRON avait su patienter, et le temps lui avait donné raison, THE TEN COMMANDMENTS et BEN-HUR ayant propulsé l’acteur au sommet du box-office, ce qui est a priori le but que recherche tout agent digne de ce nom.


    Pour CITRON, un «  working actor » avait effectivement pour vocation de… travailler, et pour lui la somme d’argent gagnée par ses clients avait plus de valeur que la beauté des dialogues d’un script ; « si vous voulez faire de l’art, enseignez donc la littérature anglaise à l’UCLA » était une de ses formules, ce qui en disait long sur ses priorités.


    Loin d’en prendre ombrage, vu que le bon sens de l’agent avait plus que contribué à sa fortune, HESTON considérait que les deux hommes étaient parvenus à un parfait équilibre dans leur relation, puisqu’ils avaient tous les deux le «  final say », l’un quant à l’acceptation d’un rôle, et l’autre quant aux clauses de signature des contrats, et donc tout le monde s’y retrouvait !


    Néanmoins, cette belle harmonie commença à quelque peu s’estomper quand, à la suite de plusieurs semi-échecs de l’artiste, notamment THE WAR LORD et THE AGONY AND THE ECSTASY, dont l’insuccès avait particulièrement énervé l’agent, CITRON se mit en tête de ne proposer à HESTON que des « deals » sur des projets sans risques, et pas forcément ce qui correspondait à ses goûts du moment !


    Et donc, début 1966, HESTON, après avoir refusé divers projets ( dont HAWAII, LADY L et le futur THE WAY WEST) décide de retourner à ses premières amours, le théâtre, pour jouer sur les planches à Los Angeles A MAN FOR ALL SEASONS,  belle pièce de Robert BOLT, dont le personnage principal, Thomas MORE, va le fasciner au point de le filmer plus tard pour la télévision.

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    (Charlton dans le rôle de Thomas More - A man for all seasons)


    Succès artistique et financier, A MAN FOR ALL SEASONS rassurera quelque peu le comédien, très atteint par ses récents échecs ( il comparera le double « flop » de  WAR LORD et  KHARTOUM      à «  deux coups de pied dans les parties nobles ! ») au point d’avoir envie de s’arrêter un peu de tourner, de s’occuper d’autre chose…


    Il se passe justement à l’époque quelque chose de beaucoup plus grave que les éventuels choix de carrière d’un acteur, car la guerre du VIETNAM fait rage, et le président démocrate JOHNSON s’est mis en tête d’en finir avec ce qu’il appelle «  l’invasion communiste dans le Sud-Est asiatique » ; dans l’optique d’une possible réélection, il fait donc le forcing pour «  vendre » aux médias sa conception du conflit en question, alors que le public américain est de plus en plus réticent à l’idée de voir sa belle jeunesse être enrôlée et sacrifiée dans une guerre qu’il ne comprend pas !

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    Les prises de position des grandes stars d’HOLLYWOOD, dont l’influence sur le grand public est tout sauf minime, vont donc vu l’importance du conflit, avoir une certaine résonance, on s’en doute ! Certains, comme Kirk DOUGLAS, Gregory PECK, Paul NEWMAN ou Henry FONDA vont prendre parti sans équivoque contre la poursuite du conflit, considérant que les enfants de l’Amérique n’ont pas à se faire tuer pour un régime sud-vietnamien pourri ; on verra même Jane FONDA, fille du célèbre acteur, poser pour LIFE devant la carcasse d’un B52 abattu par le Vietcong !


    Mais l’aile conservatrice d’HOLLYWOOD va elle aussi s’exprimer, Bob HOPE sera le premier à se rendre sur les lieux pour encourager les troupes en proposant son show, James STEWART aura des mots très durs pour « les planqués et les lâches qui refusent de se battre pour leur pays » et John WAYNE, bien sûr, éternel fanfaron des campagnes anti-communistes, va aller jusqu’à réaliser et produire THE GREEN BERETS, « œuvre » tout à la gloire de l’armée américaine, qui provoquera un tollé mondial pour son parti-pris et disons-le franchement, la bêtise sans bornes de son propos.

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    Charlton HESTON, personnage toujours « humaniste »à l’époque sur le plan politique, est quant à lui très mesuré dans sa vision du conflit ; «  toute guerre est cruelle et immorale, et celle-ci pas moins qu’une autre » écrira t-il dans ses «  journals ») mais d’un autre côté, en tant qu’ancien vétéran d’une guerre mondiale, il se sent solidaire de ceux qui combattent au Vietnam, et va donc accepter l’offre de la Maison Blanche «  de soutenir le moral des troupes américaines sur le terrain » ; s’il le fait, ce n’est pas parce qu’il approuve le régime en place, contrairement à WAYNE et à d’autres, mais parce qu’il ressent le devoir moral de «  voir les choses par lui-même » !
    Il écrira même dix ans plus tard, ce qui résume finalement sa position sur le sujet :
    «  Je sais que tout le monde a son opinion sur la guerre du Vietnam, surtout d’ailleurs ceux qui n’y ont jamais mis les pieds , du genre « c’était une guerre stupide, et nous n’aurions jamais dû la faire » ; je pense pour ma part que nous aurions dû mieux la mener, et plus vite, tuer beaucoup moins de gens et nous faire beaucoup moins d’ennemis, chez nous comme à l’étranger » ( Journals, 1978)


    Voici donc le héros de BEN-HUR, véritable icône pour nombre de jeunes américains, amené à vivre pendant deux semaines à leurs côtés, partageant leurs angoisses, leurs peurs et leurs doutes, et aussi leur quotidien, une expérience qu’il jugera « bouleversante », et bien qu’il ne leur ait pas apporté «  un lot de jolies filles et des chansons comme Bob HOPE » il jugera utile d’avoir pu converser avec un grand nombre de ces garçons «  perdus dans une guerre qu’ils ne comprennent pas toujours » et mettra un point d’honneur à appeler au téléphone dès son retour, grâce aux responsables de la Fox, toutes les familles de chacun des soldats ( environ 500 personnes !) qui lui auront confié leurs coordonnées …

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    C’est d’ailleurs dans son comportement lors de ce voyage, qu’il renouvellera deux ans plus tard, que certaines des contradictions du personnage HESTON apparaissent clairement : Il n’est pas un homme politique, ni un propagandiste que l’on déplace comme un pion sur l’échiquier politique, juste un être humain qui ne se sent pas le droit de laisser tomber ses concitoyens, et son opinion personnelle sur le conflit, il préfèrera la garder pour lui et ne l’étalera pas dans les médias .


    Retournant chez lui dans le confort de sa villa de Coldwater Canyon , il mettra beaucoup de temps à passer à autre chose, persuadé que ce conflit est bien plus complexe qu’on veut bien le dire dans la presse et à la télévision :


    « Je suis concerné par la guerre du Vietnam comme n’importe qui d’autre, mais pas forcément pour en tirer les mêmes conclusions ; je n’ai pas trouvé de solution, et je n’y suis pas allé pour en trouver une, et d’ailleurs il n’y a aucune solution facile, pour ce qui est une question de morale, pas de domination impérialiste » 


    En cette fin d’année 1966, après le triomphe de A MAN FOR ALL SEASONS au théâtre, HESTON se retrouve réélu à la présidence de la SAG ( SCREEN ACTORS GULD) position importante pour lui car elle lui permet de continuer à combattre pour les droits d’une profession qu’il juge par définition «  précaire, car l’emploi y est sans cesse en danger du fait des changements qui se produisent régulièrement dans cette industrie, et il est de mon devoir dans ma position d’aider au mieux tous ceux qui n’ont pas eu ma chance » ( Journals,1967)


    Lui en effet a beaucoup de chance, notamment celle de voir arriver sur le pas de sa porte beaucoup de scripts que seule une minorité de «  happy few » comme lui a l’occasion de lire ou de refuser ; peu excité depuis quelques temps par ce qu’on lui propose, il va néanmoins accepter un rôle dans COUNTERPOINT , un projet qui surfe sur la vague des «  films de guerre à message » autour de la seconde guerre mondiale ; en fait, il va l’accepter surtout parce que CITRON insiste, et prétend que son rôle de chef d’orchestre est un «  oscar material », en gros une chance pour lui d’être nominé !

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    Comment « Iceman » CITRON en est arrivé à penser qu’il y avait dans ce rôle le «  matériel » pour une nomination aux Oscars constitue à ce jour un mystère, car ce personnage central de «  COUNTERPOINT » (terme qui signifie dans le langage musical «  superposition de lignes mélodiques différentes) parait quand même bien ingrat et insuffisamment construit pour pouvoir prétendre à tant d’honneurs !

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    En effet, ce Lionel EVANS que HESTON , toujours intéressé par les caractères excentriques, s’apprête à jouer, n’est pas très attirant sur le papier : mégalomane imbu de sa personne, égoïste et orgueilleux, essentiellement concerné par sa musique, il ne déborde pas de sensibilité ni de compassion envers ses prochains, menant son orchestre d’une main de fer et ne faisant aucune concession à qui que ce soit ; en l’occurrence, même pas à un général allemand mélomane qui, l’ayant capturé lui et ses musiciens lors de la bataille des Ardennes, lui demande de se produire pour lui en concert privé ! point de départ tout à fait amusant et quasi onirique vu le contexte guerrier, que HESTON trouve d’ailleurs «  intéressant, avec quelques lignes de dialogue provocantes »


    Il va donc s’atteler à la tâche avec le professionnalisme qu’on lui connait, notamment pour passer un obstacle redoutable : il n’est pas musicien du tout, avoue «  chanter comme une casserole », et s’il reste mélomane et porté sur la musique classique, c’est autre chose de prendre la baguette et prétendre diriger 50 musiciens ! L’apparence, il la prend rapidement en charge car ça, il sait comment faire : à lui la tenue adéquate, le port de tête altier, le brushing à la KARAJAN, mais pour le reste, la crédibilité, il va s’apercevoir que c’est bien plus dur encore que de conduire un attelage de chars, et les leçons de Léo DAMIANI, chef d’orchestre à la MGM, vont lui être plus qu’utiles…
    Maitrisant à peu près, du moins en apparence, quelques mesures de BEETHOVEN, de BRAHMS et même de WAGNER, il va finir par faire tout à fait illusion dans cette position de «  conductor » et les séquences du début et de la fin du film avec orchestre seront il est vrai parfaitement réussies.


    Là où les choses vont se compliquer, ce que les critiques ne manqueront pas de souligner, c’est que ce personnage antipathique, de par l’imprécision des dialogues et aussi du scénario, n’est pas bien dessiné et finalement contradictoire ; comment ce EVANS, qui va passer la moitié du métrage à refuser tout compromis avec l’ennemi, peut-il faire volteface, et surtout pourquoi finit-il par s’intéresser à la survie de ses musiciens qu’il semble négliger la quasi-totalité du film ? Comment ce même personnage peut-il compatir à la détresse des membres de l’orchestre et en venir à presque se sacrifier pour eux, alors que son égo démesuré est sa principale préoccupation pendant une heure trente ?


    Autant de trous scénaristiques dont HESTON n’est nullement responsable, et il faut bien reconnaitre que la prestance, la diction exemplaire et les mouvements de mâchoire ô combien volontaires et typiques de l’artiste quand il s’agit d’exprimer sa colère, font tout à fait mouche, et ce malgré les facilités d’écriture du duo LEE/OLIANSKY, dont le scénario fut, en plus, revu avant le tournage au grand dam du » metteur »Ralph NELSON !

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    (Ralph Nelson)


    Ce NELSON est en effet tout sauf un enfant de chœur dans le milieu du spectacle : ancien acteur, puis technicien et responsable de spectacles à BROADWAY, il a à son actif de nombreuses dramatiques pour la télévision, ce qui lui a permis de travailler avec HESTON à ses débuts ; de plus , il a mis en scène quelques bons films, dont REQUIEM FOR A HEAVYWEIGHT, remarquable film sur la boxe avec Anthony QUINN, le plaidoyer anti-raciste LILLIES OF THE FIELD avec Sid POITIER qui lui a valu un Oscar , et récemment l’intéressant western DUEL AT DIABLO, ou il a réussi l’exploit de rendre James GARNER expressif, c’est dire qu’il a du métier !


    Et ce libéral de cœur qu’est NELSON, persuadé qu’il va réaliser un film «  anti-guerre » ou l’Art dans toute sa beauté se voit affronter la folie militaire pour finalement l’emporter ( du moins, c’est son idée) découvre consterné que l’ouvrage va tourner en fait autour d’un combat de coqs certes de haut niveau, mais très éloigné de la symbolique initiale…


    Il va néanmoins accuser le coup,( «  je savais que j’aurais à combattre pour que ce film, à défaut d’être réussi, soit au moins regardable », dira t’il à son sujet) et se concentrer sur ce qu’il fait le mieux, c’est-à-dire pas les scènes d’action pour lesquelles il n’éprouve aucun intérêt, mais les nombreux moments d’affrontement entre HESTON – EVANS et Maximilian SCHELL – général SCHILLER .

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    (Anton Diffrin)                                       (Maximilien Schell)


    SCHELL , «  un acteur intéressant » dira HESTON, est encore tout auréolé de son Oscar du meilleur acteur pour JUDGMENT IN NUREMBERG ou il était excellent, mais ne se souhaite pas, comme son collègue Anton DIFFRING , éternel abonné aux rôles de nazis imbuvables, se retrouver dans le costume du méchant de service ; le film étant américain, il a de gros doutes sur la manière dont l’Allemand peut être présenté à l’écran ; il va donc accentuer le charme, la vivacité et la force de caractère de son personnage, n’en faisant pas un nazi mélomane de plus, mais un homme que la guerre dépasse et qui veut conserver encore un peu d’humanité, même si son orgueil reste très marqué ; composition habile, qui s’accorde bien avec celle qu’ HESTON va fignoler pour «  son chef d’orchestre » ; déterminé et visiblement parfaitement conscient de ce que SCHELL, rusé renard, a transformé dans son personnage initial, il va prendre grand plaisir à cette partie de «  ping-pong verbal » comme il le dira lui-même plus tard.

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    Malgré la lourdeur de certains dialogues, ces deux-là vont donc s’entendre comme larrons en foire, à la fois sur l’écran et en dehors ; on peut même dire que l’intérêt principal de l’ouvrage réside dans leur confrontation, beaucoup plus que dans le triangle amoureux HESTON/NIELSEN/HAYES plaqué un peu laborieusement sur l’intrigue, sans doute pour donner un peu plus d’humanité au personnage d’EVANS.

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    (le trio HESTON, HAYES, NIELSEN)
    Avec le recul du temps, en comparant COUNTERPOINT à deux autres films de guerre de l’époque, le CASTLE KEEP ( UN CHATEAU EN ENFER) de Sidney POLLACK et le DIRTY DOZEN ( LES DOUZE SALOPARDS) de Robert ALDRICH, on constate que, du fait du manque de conviction de NELSON, COUNTERPOINT( affublé en France du grotesque titre «  LA SYMPHONIE DES HEROS !») ne possède ni l’étrangeté et le point de vue philosophique de l’un, ni la violence très rythmée et l’amertume cynique de l’autre.


    Mais les trois films ayant des défauts et chacun ayant pas mal vieilli ce qui est compréhensible, il est un aspect ou COUNTERPOINT l’emporte sans discussion, c’est dans la qualité de l’interprétation, car on a là deux comédiens au sommet de leur art, certes un brin cabotins, mais qui arrivent, par leur seul plaisir de jouer, à nous faire avaler toutes les invraisemblances et incohérences du scénario, et ce n’est pas rien !

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    Tourné assez rapidement entre novembre 66 et janvier 67, le film ne sera pas un grand succès commercial et sera plus ou moins snobé par la critique. Mais il aura eu le mérite de faire reprendre le chemin des studios à l’artiste, qui aura donc connu une année en demi-teinte, marquée par l’expérience du Vietnam et le décès de son père, une année qui l’aura vu grandir, sans diminuer sa soif d’aventures .


    Et c’est tant mieux pour lui , car une certaine planète l’attend…


    Pour France.
    Joyeux anniversaire, et affectueuses pensées.

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