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ADRIEN - Traducteur de Michael Munn - Page 2

  • 30 - "Charlton Heston une biographie " de Michael Munn - (traduction par Adrien P.)

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    Mari et Père

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    Charlton et Lydia étaient un phénomène rare à Hollywood. En mars 1972, ils célébrèrent leur vingt-huitième anniversaire de mariage. Le fait que leur mariage ait survécu si longtemps était presque un mystère. C'était un point que Charlton détournait avec beaucoup d'humour. « Il faut avoir une certaine dose de tolérance mutuelle et un engagement basique envers le mariage, » expliquait-il avant d'ajouter : « ce qui est vraiment essentiel, c'est d'être un superbe mari, et il se trouve que je suis un superbe mari ! »

    Mais comme ils l'avaient déjà dit, leur mariage n'a pas toujours été une longue lune de miel, et au début des années 70, les Heston traversaient clairement une crise qui mit leur relation à l'épreuve comme jamais, et c'était les migraines de Lydia. Ils étaient comme pris dans un cycle infernal. Les migraines créaient des tensions dans le foyer qui ajoutait du stress ne faisant qu'aggraver les migraines. Les choses en arrivèrent à un effrayant seuil critique quand Charlton et Lydia eurent une énorme dispute. Pour se calmer, Charlton alla faire du jogging, mais la situation n'était pas calmée. Lydia annonça qu'elle partait à Honolulu pour écrire une pièce.

    « eh bien, tu veux que je t'accompagne ? » demanda Charlton.

    « Non, » répondit-elle.

    Elle passa les quelques jours qui suivirent seule à Honolulu jusqu'à ce que, incapable de le supporter plus longtemps, Charlton, Holly et Fray la rejoignirent pour être à ses côtés. Elle et Chuck se réconcilièrent et restèrent au luxuriant Royal Hawaiian Hotel pendant quelques jours.

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    (Royal Hawaiian Hotel)

    photo : https://www.historichotels.org/hotels-resorts/the-royal-hawaiian-a-luxury-collection-resort

    La crise prit fin pendant quelques jours, mais les migraines continuelles et les tensions étaient toujours là. Au bout d'un an seulement, ils semblèrent de nouveau sur le point de se séparer, mais à la dernière minute, ils en arrivèrent à l'inévitable conclusion qu'ils ne pouvaient pas vivre l'un sans l'autre.

    Tout en étant une période de crise pour la famille Heston, c'était aussi une période de croissance de plusieurs façons. Fray était maintenant un adolescent grand et maigre, et Holly une brillante jeune fille de onze ans aux portes de la puberté. Elle était également un peu farceuse. Charlton a une histoire sur elle qu'il adore :

     

    «Quand elle avait huit ans, elle a réussi une fois à avoir mon autographe parmi un groupe d'enfants sans que je m'en rende compte, et ça l'a ravie au plus haut point. Il y avait toute cette foule d'enfants et j'essayais de la traverser, vous savez, et Holly est venue et m'a tendu un truc à signer. Après cela, elle me l'a montré dans la voiture en jubilant.»

     

    Fray, qui avait maintenant dix-sept ans, devenait vraiment un enfant de la forêt, comme l'avait été son père. Cela venait beaucoup de Chuck qui s'assura que Fray sache monter à cheval à partir de l'âge de huit ans. Il l'emmenait également dans le désert et lui apprit à tirer, et quand l'occasion se présenta plus tard, ils allèrent ensemble avec Joe Canutt à la chasse au sanglier. Charlton encouragea aussi son fils à jouer au tennis, mais c'était la vie extérieure qui captivait vraiment Fray. En recherche d'aventure, il devint très indépendant. Il me dit :

     

    «Quand j'avais dix-sept, j'avais un truck, et j'avais coutume d'aller à travers toute l'Amérique. J'allais en Alaska et en Idaho le week-end, et au Mexique le vendredi soir. J'ai conduit ce truck partout. J'adorais faire ça et je le faisais avec très peu de moyens à l'époque. Je me suis beaucoup amusé, et je pense aussi que j'ai beaucoup appris de choses sur le pays

     

    Quand à savoir comment il a réussi à rester proche de son père sans passer par la période rebelle de l'adolescence, il dit :

     

    «Ca s'explique plus par mon père que par moi. C'était un père strict, mais pas austère. Il était aimant, et ma mère aussi a joué un grand rôle dans les bonnes relations que nous entretenons encore parce qu'elle m'a toujours traité avec respect, amour et admiration, et je leur ai rendu ce qu'ils m'ont donné. C'est une situation très simple d'échange de bon procédé.

    Quand j'aurai mes propres enfants, je pense que je les enverrai chez mes parents jusqu'à ce qu'ils deviennent adultes et les récupérer ! Je suis sûr qu'ils feraient un meilleur boulot que celui que je pourrais faire.»

     

    Charlton était gaga de sa fille et le fait qu'elle soit adoptée ne faisait aucune différence pour lui ou pour Lydia. Pour lui, c'est sa petite, et tout comme il le fit  pour que Fray aime sa vie d'homme, il s'assura qu'Holly devienne une parfaite jeune fille. Lydia, cependant, pense que parfois, il est allé trop loin. Elle raconte :

     

    «Vous savez, Chuck a appris à Fraser à jouer au tennis pour toujours avoir quelqu'un avec qui jouer, mais il pensait qu'Holly ne devait pas apprendre à jouer. Je lui ai dit : « c'est ridicule, bien sûr qu'elle devrait apprendre aussi. » Donc elle apprit. mais il ne la laisse pas jouer. Vous savez pourquoi ? Il est le président international de la Société de Prévention des Joueuses de tennis ! »

     

    Une chose qui lui fit plaisir à propos de ses enfants, est qu'ils n'ont jamais montré le moindre signe de vouloir devenir acteurs professionnels. Il savait de par sa propre expérience personnelle et douloureuse que ça pouvait être un moyen pénible de gagner de l'argent, et dès qu'il est appelé à aller parler à des corps étudiants à propos de l'art d'être acteur, il fait de son mieux pour dissuader chacun d'eux d'envisager une carrière d'acteur.

    A en juger  par le succès qu'il eut en tant qu'acteur, cela peut paraître difficile à comprendre, mais très jeune, Holly comprit les sentiments de son père. Comme elle le dit un jour à un journaliste qui ne comprenait pas pourquoi elle ne voulait pas devenir un star de cinéma quand elle serait grande : « Mon père connaît beaucoup d'acteurs qui sont sans travail. »

     

    « Je préférerais jouer un sénateur qu'en être un ! »

     

    C'était son anniversaire, son quarante-neuvième anniversaire. Pendant un moment, tous ceux sur le plateau de Soleil vert à MGM Studios s'arrêtèrent de travailler tandis qu'un grand gâteau glacé fut apporté sur un chariot. Il était décoré avec une image en glaçage d'Heston en Moïse tenant les tablettes des dix commandements.

    Tout le monde, y compris le réalisateur Richard Fleischer, chanta « Joyeux Anniversaire ! » quelques semaines seulement avant que le célèbre père de Fleischer, Max, le seul producteur de films d'animation à avoir sérieusement concurrencé Disney, ne décéde et que les bureaux soient fermés pendant une journée. Mais pour l'instant, la bonne humeur et la frivolité régnaient, alors même que le travail recommençait, bien que Richard Fleischer ne laissa pas l'atmosphère généralement joyeuse se mettre en travers du travail : faire ce qu'Heston espérait voir devenir un autre thriller futuriste innovant.

     

    Pour la première fois depuis Les dix Commandements, Charlton faisait un film avec Edward G. Robinson, devenu un homme de 79 ans frêle et, même si beaucoup l'ignoraient, mourant. Lui, cependant, savait qu'il mourait du cancer, et pourtant, il ne rata pas une seule journée de tournage. Ironiquement, comme Heston s'en rendit tristement compte après, la dernière scène que fit Robinson était la scène de sa mort dans laquelle il est doucement endormi volontairement en regardant des films montrant combien le monde était beau auparavant. Il savait, bien qu'il ne l'ait jamais avoué, que ce serait le dernier travail qu'il accomplirait en tant qu'acteur.

    Soleil vert était un film efficace et terrifiant, et tout comme les Singes et Le Survivant, le succès fut immédiat. Il était de nouveau prêt à retourner au pays de l'acteur. Il se tenait dans l'aile du Ahmanson Theater à Los Angeles, l'un des plus prestigieux de tous les théâtres américains. Broadway n'était plus le but suprême du théâtre américain, mais juste être de nouveau dans un théâtre, peu importe où, après six longues années loin de la scène, c'était l'exaltation dont avait besoin Chuck et qui lui avait manqué. Il y avait encore cette petite peur de la scène, ce moment de tension mêlé d'excitation juste avant de monter sur scène, et il savait qu'il serait bon dans cette pièce, The Crucible, et il savait également que c'était une pièce contemporaine, la seconde pour lui avec A Man for All Seasons. Ils jouèrent même le soir de noël, tant le succès fut au rendez-vous pour la pièce qui était complète presque tous les soirs pendant les cinq semaines où elle fut jouée. Se terminant triomphalement dans la deuxième semaine de 1973, il se prépara à réciter quelques paroles de Thomas Jefferson.

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    photo :  https://www.centertheatregroup.org/about/timeline/1967-1977/

    Le discours était pour le jour de l'investiture du président Richard Nixon à Washington. Il soutint Nixon, ce qui était étrange puisqu'il avait jusque là toujours voté pour le parti démocrate, mais cette fois-là, il se sentit forcé de voter républicain et resta républicain depuis. À cause de son soutien et de son talent, il se retrouva à participer à un concert au Kennedy Center lisant Jefferson sur une musique dont il souhaitait vraiment qu'elle ne soit pas  là.

    De nouveau, Heston fut bien vite de retour à Washington, cette fois pour représenter l'American film Institute, et pendant qu'il y était, il eut l'opportunité de jouer en double au tennis avec le sénateur Edward Kennedy. Charlton et son partenaire, le sénateur Tunny, se firent écrasés par Kennedy et son partenaire, mais ce qui était vraiment important était d'organiser l'ouverture de la salle de cinéma de l'American Film Institute ainsi que de renforcer la position de l'AFI.

    Il y avait également un dîner de remise de l'AFI Life Achievement Award pour John Ford à Los Angeles que Charlton aida à organiser et accueillir. Le président Nixon y était et remit également à John Ford la Medal of Freedom. Charlton était très fier en tant que membre de l'AFI d'avoir le privilège de présenter le nouveau président des États-Unis ce soir-là.

    Avec tout ce travail qui lui prenait du temps, et si peu pour être acteur, il y avait de nouvelles tensions sur la famille qui semblèrent se manifester sous la forme des migraines de Lydia. Elle dut finalement être hospitalisée. Les médecins virent alors que sa glande thyroïde était enflée. Charlton eut heureusement assez de temps pour rester à Los Angeles et la soutenir pendant sa guérison. Il espérait qu'avec cette opération qui aurait dû être faite bien plus tôt, les terribles problèmes dont Lydia avait souffert allaient disparaître.

    Le jour où il la ramena à la maison, il dut de nouveau la laisser ce qui ne fut pas facile car le simple fait qu'il parte la bouleversait terriblement. Il avait cependant un autre engagement qui l'attendait en Espagne pour jouer le cardinal Richelieu dans Les Trois Mousquetaires de Richard Lester.

    Au départ, Lester voulait Heston pour jouer Athos dans cette version comique du roman de Dumas. Il fallait tourner en Espagne, et comme Athos a un rôle assez faible mais est pourtant nécessaire dans beaucoup de scènes, Chuck n'était pas du tout motivé à passer l'été en Espagne sans grand rôle à jouer. Il proposa donc à Lester de lui donner une apparition à faire, et Lester proposa  Richelieu, sur lequel Charlton réagit, surtout quand Lester lui dit qu'il n'avait besoin de travailler que dix jours.

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    Heston aima jouer ce rôle, surtout parce qu'il signifiait qu'il devrait se cacher encore derrière une autre barbe et un faux-nez. Il avait toujours aimé créer le visage d'autres hommes à partir du sien. Il trouva également que Richelieu était un personnage fascinant à jouer. Il dit :

     

    « Le film était une interprétation sardonique de l'époque et des personnages. En fait tous les mousquetaires sont des crétins empotés tout comme le roi, ce qui est historiquement vrai.

    J'ai alors dit à Richard : « à quel point veux-tu que je sois comique? » Et Richard répondit « pas du tout. Tu dois jouer Richelieu comme si nous faisions un film biographique sur lui. Il doit être un antagoniste parfaitement crédible. »

    Je l'ai donc joué ainsi, droit, et bien que dans le roman de Dumas, il est un des grands méchants, il était en vérité l'un des hommes les plus talentueux de l'histoire de France. Il était certainement le seul homme avec une réelle intelligence ou des compétences dans le film.

    Il y a eu une phrase que j'ai lue dans une des biographies de Richelieu qui m'a tellement impressionné que j'ai demandé à Richard de l'intégrer. Quelqu'un lui dit : " ça doit être horrible d'avoir autant d'ennemis, " et Richelieu répond " moi ? Je n'ai pas d'ennemis. La France a des ennemis.

     

    Durant le tournage, Lydia vint pour être à ses côtés, faible mais heureuse d'être avec son mari. Quand chuck en a eu terminé avec le film, ils allèrent en Allemagne quelques semaines pour prendre des vacances, mais pendant qu'ils étaient là-bas, la tante de Lydia, Belle Clarke, est décédée, provoquant un choc dont n'avait pas vraiment besoin une Lydia déjà affaiblie. Ensuite, à peine quelques semaines plus tard, le père de Lydia décéda.

    Ils s'envolèrent pour Two Rivers pour l'enterrement, Lydia dans une chaise roulante à cause de problèmes de dos. Ils furent rejoints là-bas par Fray qui était parti pour une de ses aventures. Il avait dans l'idée de devenir biologiste marin, et passait une grande partie du temps hors de la maison, un état de fait difficile à supporter pour Lydia. C'était beaucoup plus difficile pour elle que pour Charlton de laisser leur garçon quitter le nid, et elle trouva cela tout aussi difficile de tenir,  juste une semaine après la mort de son père, quand Fray est parti à San Diego s'inscrire à la UCSD1  pour étudier la biologie marine.

     

    A SUIVRE...

     

    1University of California San Diego

  • 29 - "Charlton Heston une biographie " de Michael Munn - (traduction par Adrien P.)

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    Quatrième Partie

     La bienvenue du héros

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    La neige de Londres n'était pas celle craquante, frissonnante, accueillante qui tombait à St Helen. Elle tournoyait à la sortie du Queen's Theater au cœur de Londres, humide, pénétrante et misérable, mais n'aurait pas pu suffire à saper le bonheur de la presse impatiente de Fleet Street qui s'avançait pour accueillir l'homme sortant de la voiture comme une sorte de héros conquérant. Charlton Heston était venu en ville, créant ainsi un grand émoi. 

    Non pas qu'être à Londres, sa capitale européenne favorite, soit quelque chose de nouveau, mais cette fois – en février 1985 – il était venu réaliser un vieux rêve : se produire sur une scène londonienne. Il était acteur professionnel depuis quarante ans, avait remporté un Oscar du Meilleur Acteur, avait reçu un autre Oscar spécial1, gagné tellement d'argent qu'il n'aurait plus jamais besoin de travailler, mais n'avait encore jamais accompli ce qu'il considérait être le sommet de toute carrière d'acteur. Il expliqua : « je pense que pour tout acteur qui joue en anglais, tant qu'il n'a pas joué en Angleterre, il n'a en fait encore jamais joué. » Après quatre décennies, il était enfin sur le point de le faire, vraiment le faire. Il était venu avec une grande troupe d'acteurs tous américains et la brillante pièce d'Herman Wouk, The Caine Mutiny Court-Martial qu'il mettait en scène en plus d'y jouer le capitaine Queeg.

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    PHOTOS : https://www.collectors.com/entertainment-item/caine-mutiny-court-martial-playbill-charlton-heston-queens/2508786621438883408

    Lors de la conférence de presse du Queen's Theater, il se retrouva encerclé de tous côtés par des journalistes et des photographes. Ca n'avait bien sûr rien de nouveau. Il savait comment gérer ce genre de situation. Mais cette fois, son plaisir et son enthousiasme d'être en Angleterre rendirent plus agréable et plus simple son exposé des raisons pour lesquelles il voulait jouer en Angleterre, jouer cette pièce en particulier, la mettre en scène et pour son choix de  l'acteur anglais Ben Cross, la star de Les Chariots de feu.

    Comme Charlton l'expliqua, « Avec cette pièce, on a deux auriges appelés Ben pour le prix d'un seul : Ben-Hur et Ben Cross ! »

    Même avant que The Caine Mutiny Court-Martial soit joué devant le public anglais, Charlton Heston apparaissait partout sur les médias, invité dans toutes les émissions de télé, donnant des interviews à la radio et quelques-unes à la presse, tant la demande de communiquer avec le public anglais à cette star presque légendaire du cinéma était grande. Ça faisait longtemps qu'Heston n'avait pas fait une telle sensation à Londres. L'âge n'avait pas affaibli sa stature ou son image : il avait soixante-deux ans, mais toujours, comme le décrivit un journal, « le plus charpenté des enfants d'Hollywood. »

    Le succès de la pièce dépendait cependant de plus de paramètres que sa seule image de marque, alors que lui dépendait du succès de la pièce. C'était de loin son projet le plus personnel et le plus important depuis le tournage d'Antoine et Cléopâtre quatorze ans plus tôt.

    Le temps avait soigné les blessures dont il avait souffert à cause de ce film, et s'il croyait vraiment en ce qu'avait dit Gordon de Khartoum (que sa seule peur était celle d'échouer), alors il était encore plus déterminé à ce que The Caine Mutiny Court-Martial ne connaisse pas le même sort que son cher Antoine et Cléopâtre avait subi plus d'une décennie plus tôt.

    Le traumatisme d'Antoine

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    Durant tout le temps du tournage d'Antoine et Cléopâtre, Lydia fut ravagée par les migraines de plus en plus fréquentes. Les expliquer n'était pas si simple, mais tous deux supposèrent que la pression en faisant ce film cet été-là devait les stresser tous les deux plus que d'ordinaire.

    Lydia dut certainement vivre des moments d'inquiétude durant ces huit semaines en Espagne. Elle dit : « Charlton était si occupé par Antoine et Cléopâtre entre son travail de réalisateur et celui d'acteur. Normalement, il est très prudent, et c'est un épéiste expérimenté, mais j'ai vu quand il est rentré à la maison après une des scènes de bataille que ses mains étaient pleines d'entailles. Bien sûr, je m'inquiéte quand il fait des choses dangereuses, et bien sûr que des accidents peuvent arriver, mais on n'y pense pas. »

    Espérant que les maux de tête diminueraient une fois de retour à Coldwater Canyon, Charlton avait hâte de rentrer pour travailler sur le montage dans sa propre salle de projection en compagnie d'Eric Boyd-Perkins. Les maux de tête ne cessèrent cependant pas, et la frustration d'Heston grandissait au fil des jours où il attendait qu'arrivent les bobines de film.

    Elles arrivèrent enfin et Heston et Boyd-Perkins s'enfermèrent pendant plus d'un mois pour monter les prises et en faire un film entier, et les migraines de Lydia continuaient toujours. C'était une course contre la montre pour Heston qui travaillait d'arrache-pied pour que le film soit doublé et mis en musique à temps,  avant le London Opening où Antoine et Cléopâtre aurait sa Première en mars 1972. Il dut cependant laisser la fin du montage à Peter Snell, ayant un engagement à tenir avec MGM pour jouer dans leur film Alerte à la bombe2. Il dut également mettre fin à son règne en tant que président de la SAG tant il était pressé par le temps. Aussitôt après sa démission, ceci dit, il se retrouva élu à la American Film Institute.

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    Pour jouer le pilote de Alerte à la bombe, il fit de son mieux pour avoir l'air convainquant en s'entraînant dans un simulateur d'avion. Le film n'en exigeait pas tant, simplement de paraître pouvoir piloter un avion. Ce n'était pas vraiment le rôle de plus exigeant de sa carrière. Il dit : « Je me glissais tous les jours dans la cabine du pilote et volais sans destination au trentième étage. Quand j'étais chanceux, le réalisateur John Guillermin me laissait dix minutes pour aller aux toilettes avant la pause déjeuner. Hormis ça j'étais sanglé dans le cockpit. Les seuls muscles que je pouvais utiliser ici étaient mes cordes vocales ! »

    Les censeurs australiens, sans qu'on sache vraiment pourquoi, eurent le sentiment que le film pourrait encourager le détournement d'avions et interdirent le film. Quand Chuck eut vent de la controverse, il dit : « je ne vois pas en quoi le film est polémique sauf pour ceux qui détournent des avions, qui sont une toute petite minorité dans notre société. Personne n'ira jamais soutenir que le détournement d'avion est une bonne chose. Notre terroriste rencontre une fin brutale et bien méritée. Ce film n'encouragera jamais personne à détourner des avions. »

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    Malgré son interdiction en Australie, le film eut un grand succès, et malgré le fait qu'Heston apparaisse en fait dans relativement peu de scènes, il en tira les bénéfices financiers plus que bienvenus, surtout après avoir mis tant d'argent dans Antoine.

    Avec Alerte à la bombe dans la boîte, Heston s'envola pour Londres pour la première mondiale d'Antoine et Cléopâtre à l'Astoria le 2 mars. Il commença la journée avec une course matinale de 5 kilomètres3 dans Hyde Park. Plus tard dans la matinée, il fit une apparition en public au Selfridges sur Oxford Street où il fut assailli par des milliers de fans.

    La première elle-même était menacée par une vague de coupures de courant qui touchait alors le pays. Un générateur de secours était à disposition, mais heureusement, il n'y eut pas de coupures cette nuit-là, et le premier film réalisé par Heston fut diffusé sur le Cinérama de l'Astoria. Les critiques ne furent cependant pas impressionnés. D'après le Daily Express, « la tragédie et la passion… disparaissent devant vos yeux… la faute pour cette interprétation malheureuse est à mettre sur les larges épaules de Charlton Heston. »

    Les autres journaux étaient plus ou moins d'accord, même si le Guardian concède : « Quant à Heston en tant qu'acteur, c'est une autre histoire. Voilà une interprétation solide et parfaitement adéquat d'Antoine. »

    Heston fut foudroyé en lisant les critiques, et on ne s'explique pas pourquoi les critiques furent si cinglants. La seule vraie faiblesse du film est Hildegard Neil, et cela donna raison à Orson Welles qui disait que la pièce ne pourrait jamais rencontrer du succès sans une grande Cléopâtre. À part ça, le film est magnifiquement cadré, bien rythmé et dans l'ensemble bien joué par presque tous les acteurs. Heston était également superbe en Antoine.

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    Après sa diffusion à West End, Antoine et Cléopâtre disparut et ne sortit pas. En Amérique, il ne fut montré qu'une seul fois dans un petit cinéma d'art et d'essai, et c'était une version abrégée. Rempli d'amertume, Heston alla en Norvège pour faire L'Appel de la forêt et vit que lui et le réalisateur britannique Ken Annakin étaient tombés sur une bande d'amateurs. La vraie vedette du film était un chien, mais les producteurs de différentes nationalités n'avaient même pas obtenu les services d'un chien entièrement entraîné, ce qui ralentit naturellement la production. Ils trouvèrent finalement un excellent chien, mais L'Appel de la forêt devint le cauchemar d'Heston. Parlez-lui de ce film, comme j'ai déjà entendu quelqu'un le faire, et il vous répondra très probablement comme il le fit alors :

    «J'aurais préféré que vous ne parliez pas de ce film. Ça a été sans conteste le pire film de ma carrière. Je n'ose même pas demander pardon pour le script, parce que si l'on n'est pas capable de faire un bon film à partir du meilleur roman de Jack London, c'est qu'on a vraiment tout foiré

    Quand je lui en ai parlé, j'ai dû admettre que je n'avais vraiment pas trouvé le film si mauvais que cela. Il me répondit :

    «Évidemment, il m'a déçu parce que le roman de Jack London était juste incroyable. Nous aurions dû tourner en Alaska, dans le Klondike, et puis j'ai le sentiment que nous aurions pu en faire beaucoup plus. Plus de temps aurait dû être consacré au travail avec les chiens. Le film fut fait alors que nous étions pressés par le temps. Croyez-le ou non, c'était une coproduction germano-italo-anglo-hispano-norvégienne, ce qui signifie bien sûr qu'il fallait des citoyens de chacun de ces pays pour jouer un rôle, signifiant que j'étais le seul acteur qui n'allait pas être doublé. Cela mena à quelques complications.

    Bien sûr que le plus gros du film a bien fonctionné, mais j'aurais espéré que ce soit mieux que ça ne l'a été.

     

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    Je me suis toujours bien entendu avec les chiens. J'ai presque toujours eu des bergers, et j'aimais beaucoup le chien. C'était un bon chien. Il resta avec moi une bonne partie du temps dans l'hôtel à Oslo, mais j'ai trouvé que la Norvège était un pays un peu morne

    Talonnant Antoine, tout cela aurait pu être un coup rude à son moral, mais il n'a jamais été le genre d'acteur à juste s'asseoir et à attendre que les scripts arrivent à lui. Il joue presque toujours un rôle crucial dans la mise en place de ses films, et il essayait depuis quelques temps d'en faire un, tiré d'un livre qu'il avait lu en 1968 titré Soleil vert4. MGM le prit finalement comme prétexte pour avoir un film avec Heston pour suivre le succès phénoménal de Alerte à la bombe. C'était une histoire futuriste sur comment l'augmentation de la population et les réserves limitées de nourriture mènent au chaos. On y produit une nourriture synthétique, et un policier, joué par Heston, découvre que cette substance est préparée à partir de cadavres humains. Elle s'appelle Soleil vert5, et en temps voulu, Soleil vert devint le titre du film. Cela avait clairement l'air du genre de film susceptible d'aider à effacer le traumatisme de l'échec d'Antoine et Cléopâtre.

     

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    1 Le prix humanitaire Jean Hersholt, en 1978

    2 Skyjacked

    3 3 miles

    4 Make room ! Make room ! La traduction française est arrivée en 1974, après la sortie du film avec Charlton Heston

    5 La traduction officielle en français de « soylent green », une compression de « soja » et « lentille » en anglais

  • 28 - "Charlton Heston une biographie " de Michael Munn - (traduction par Adrien P.)

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    Le Projet le plus important de l'artiste

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    Il venait de faire sa promenade quotidienne dans Hyde Park et était de retour dans sa suite au sixième étage du Dorchester Hotel. Il était à Londres pour préparer ses acteurs pour les semaines à venir en Espagne où ils joueraient l'histoire d'Antoine et Cléopâtre. Il répéta seul ce matin-là, tendu mais en pleine concentration détendue. Il s'interrompait de temps en temps, comme un réalisateur interrompt un acteur, et se précipitait pour vérifier quelque chose dans l'ouvrage de référence. Cet après-midi-là il s'est rendu à Nottingham en tant qu'intervenant invité à une conférence John Player dans la salle de cinéma. L'une des questions qu'on lui a le plus posée ce jour-là était : « pourquoi portez-vous une veste brodée de plumes d'émeus ? » Il répondit patiemment à chaque fois : « je l'ai obtenue en jouant au tennis en Nouvelle-Zélande. »

     

    Pour un homme assailli par les inquiétudes et les attentes pour le film qu'il était sur le point de faire, il était remarquablement calme. Sur le chemin vers Nottingham, l'un des pneus de la voiture éclata sur l'autoroute. Il conseilla avec sang-froid aux autres passagers dans la voiture de se préparer au cas où la voiture se retournerait. Tandis que le chauffeur arrêtait la voiture,  il montra calmement le magnifique paysage de chaque côté de l'autoroute.

    N'arrivant que quelques minutes en retard, Charlton Heston resta tout aussi calme en répondant aux questions. Il avait appris à gérer ce genre de forum ouvert grâce à un auditoire, et il savait que les questions qui ressortiraient seraient les mêmes que celles auxquelles il avait déjà répondu des millions de fois. Il connaissait déjà les réponses comme s'il avait déjà lu un script. Donc quand quelqu'un lui demanda comment il avait coupé la Mer Rouge en deux, il répondit : « j'avais un gros bâton ! »

     

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    Peut-être que le public, comme beaucoup d'autres lors de telles conférences ou dans des studios télé, croyait voir l'homme tel qu'il est vraiment, mais c'est une performance, son caractère naturellement timide masqué par la masse de réponses enregistrées dans sa tête. Il répond simplement à chaque question avec une réponse appropriée, et si une nouvelle question apparaît, il crée une toute nouvelle réponse rapidement et l'enregistre mentalement pour s'en resservir plus tard.

    La conférence John Player fut un divertissement plaisant pour le distraire de ce qui occupait son esprit, mais une fois terminée, il laissa ses pensées de nouveau être submergées par Antoine et Cléopâtre parce que c'était la véritable raison de sa présence en Angleterre.

    L'équipe d'acteurs qu'il avait choisie était surtout composée d'Anglais comme Eric Porter, John Castle et Julian Glover. Il y avait aussi un certain nombre d'acteurs et de techniciens espagnols : un compromis qu'il avait fait pour être soutenu financièrement par une compagnie espagnole de films. Le reste de l'argent venait de banques et il s'est lui-même porté garant pour le remboursement. Il y avait réfléchi encore et encore ; réfléchi à s'il avait le droit de dépenser l'argent qu'il avait gagné pour la sécurité de sa famille, pour quelque chose qu'il n'avait à faire que pour satisfaire personne d'autre que lui-même. Il en discuta avec Lydia et elle le soutint de tout son cœur.

     

    vlcsnap-00084.png  (Julian Glover)          vlcsnap-00147.png     (John Castle)                                                                                                                                                            

                                             

    vlcsnap-00373.png    (Eric Porter)                    PDVD_307.png (Diana Rigg )

                                                   

     

    Il se souvint du conseil qu'Olivier et Welles lui avaient tous les deux donné : « tu dois répéter toute la pièce pendant autant de semaines que possible avant de commencer le tournage, et tu as besoin d'un bon acteur pour jouer Antoine pendant que tu diriges les répétitions et que tu prépares le tournage. »

    Heston et sa troupe jouèrent toute la pièce pendant trois semaines une douzaine de fois ou plus pour la structurer et la restructurer. Hildegard Neil, qui faisait partie du casting, raconte :

    «Chuck voulait voir dans quelle genre de direction il devait aller. Il ne voulait pas forcément que tout soit bon dans les répétitions, mais au bout de deux semaines, on avait une idée assez claire de ce qu'il allait vouloir. On était capable d'aller au travail avec ses idées en tête. C'était nécessaire pour lui de faire ça, parce qu'une fois le tournage commencé, il faut s'occuper de la position de la caméra, le parcours à tracer etc.»

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    Les répétitions, qui avaient lieu dans une salle miteuse près de Covent Garden, montrèrent qu'il avait reçu d'excellents conseils. Le conseil d'avoir un autre acteur pour jouer son rôle pendant qu'il dirigeait était tout aussi précieux. Il choisit Julian Glover qui allait jouer Proculeius que, ironiquement, Charlton avait joué à Broadway.

    Hildegard dit de Glover : « il a appris toutes les répliques d'Antoine et il a joué les scènes avec moi, ce qui était inestimable. Il venait toujours avec des idées qui ne pouvaient pas lui servir à lui, mais à moi et à Chuck. »

    L'éloge d'Heston à Glover est éclatante :

    «La performance de Julian Glover en Proculeius est remarquable, mais son tout aussi bon travail en Antoine durant des répétitions interminables pendant que je donnais forme au rôle et au film n'est pas seulement une preuve de son talent, mais aussi de son sens de la discipline au travail.

    Pour un acteur, préparer tout un rôle et se le voir refuser à la fin, c'est comme emmener une dame à un bal, lui offrir du vin et le repas, puis la laisser dans les bras d'un autre homme. Qu'il ait supporté cette frustration avec une constante bonne humeur est un acte de bonté dont je ne lui serai jamais assez reconnaissant

    Heston était en Espagne dans l'été 1971 avec sa petite armée d'acteurs et de techniciens, transformant le terrain en Rome et en Égypte et retournant deux mille ans en arrière. Il n'avait que huit semaines pour que tout soit prêt. On força le rythme, on fit plus de compromis qu'il ne l'aurait voulu, des scènes furent sacrifiées pour gagner du temps, mais chaque acteur mit tout son cœur à produire le film que voulait Heston. D'après les propos de Hildegard :

    «Il y a mis ses tripes. On devient si loyal envers Heston parce qu'il est enthousiaste, parce que ça représente tant pour lui. On ressent aussi de l'émerveillement pour cette superstar de cinéma qui fait tant pour notre profession, un homme qui continue de prendre le temps de monter sur scène parce qu'il aime jouer au théâtre, un homme si impliqué dans tout ce qu'il fait.

    Tout le monde a uni ses efforts et cela donna une merveilleuse atmosphère.»

    Il n'y a probablement jamais eu de réalisateur qui inspirait plus de loyauté à ses acteurs qu'Heston, mais ce qui était vraiment remarquable, c'est qu'en plus de s'avérer être un réalisateur compétent, il réussit quand même à faire d'Antoine l'un de ses meilleurs rôles. Le voir briller en Antoine ne devrait cependant pas être si surprenant que cela. Comme il me le dit :

    «Antoine dans Jules César, que j'ai joué à l'université, dans le film de Bradley et dans celui de Burge, est sans doute le grand rôle classique le plus susceptible de fonctionner même si l'acteur est mauvais1. S'il ne devait y avoir qu'un seul rôle facile dans la pièce, ce serait celui d'Antoine. Non seulement c'est le rôle le plus court parmi les principaux, mais aussi de loin le meilleur. Je veux dire, regardez le pauvre Brutus, là, qui trime pour surmonter les difficultés, et ici Antoine qui se balade de temps en temps et qui n'a que des choses épatantes à faire.

     

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    (Charlton Heston dans le rôle d'Antoine en 1950 - JULES CESAR de David BRADLEY)

    Antoine dans Antoine et Cléopâtre est un rôle bien plus difficile que dans César, mais c'est intéressant d'avoir la chance, en un sens, de jouer le développement de cet homme, passant de l'homme sanguin de César dans lequel Antoine est une figure triomphante, à la tragédie grandissante de l'autre pièce dans laquelle le rôle d'Antoine est exquisément écrit.

    La pièce en elle-même n'a jamais été un grand succès sur scène, et d'après moi, c'est parce que toutes les autres grandes pièces se passent surtout dans la tête des personnages : ce qui se passe dans le cœur d'Hamlet est bien plus important que l'endroit où ça se passe. Le fait que Macbeth tue Duncan en Écosse n'a pas vraiment d'importance. Le fait qu'Othello vive à Venise n'a pas vraiment d'importance, mais Antoine et Cléopâtre joue beaucoup sur la différence entre Rome et l’Égypte. La pièce se passe très exactement à Alexandrie, en Grèce, en Sicile et à Rome. C'est également la seule parmi les pièces majeures où se passe une bataille où le résultat a beaucoup d'importance pour les rôles principaux, et représenter la bataille d'Actium sur scène est presque impossible2. C'est juste infaisable, et il y a deux batailles principales dedans.

    C'est la pièce qui exige à tout prix une caméra. William Shakespeare était un auteur de cinéma né.»

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    Tandis que le tournage avançait, rien n'aurait pu détourner Heston de son objectif. Même quand on le tint un jour pour malade, il est venu en titubant jusqu'au plateau et maintint le rythme malgré un hébétement maladif. Son propre professionnalisme strict mena inévitablement à des angoisses. Rafael Pacheco, le directeur de la photographie, semblait prendre tout son temps pour éclairer le plateau, faisant perdre un temps précieux et forçant Charlton à éliminer des scènes qu'il avait prévu de faire. D'autres contretemps lui firent considérer son contrat de coproduction comme une erreur, et il avait encore d'autres problèmes à gérer.

    Les migraines continuelles de Lydia étaient plus insoutenables que jamais, et il se demandait à quel point il en était la cause. Il avait également conscience en regardant les prises de vue, qu'Hildegard Neil, aussi bonne actrice soit-elle, n'était pas la grande Cléopâtre qu'il avait espérée et qu'Orson Welles lui avait dit d'avoir. Toutefois, il se dit que la pièce était ce qui comptait et qu'il pouvait quand même approchait de son rêve. Il savait qu'en tant que cinéaste, il ne pourrait jamais complètement réaliser son rêve dans un projet, mais il voulait juste en approcher, et il essaya de toutes ses forces.

    Alors, quand les huit semaines de tournage s'achevèrent, il se mit au milieu du décor vide, le regardant être démonté. Il était fatigué. Il avait relevé le défi et survécu, mais aussi loin que sa mémoire puisse remonter, il n'avait jamais été aussi fatigué, et il avait hâte de rentrer à la maison.

    Même l'épuisement sans limite n'était cependant pas suffisant pour siphonner toute la joie d'avoir fait Antoine et Cléopâtre, même la perspective de tout le montage et le doublage qu'il restait à faire. Il me dit : « j'ai aimé faire ce film. Ce fut le projet le plus important… le plus important sur le plan créatif de toute ma vie. »

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    1Heston, en anglais, dit que le rôle d'Antoine est « actor-proof » (litt. « qui résiste à l'acteur »)

    2Parce que c'est une bataille navale

  • 27 - "Charlton Heston une biographie " de Michael Munn - (traduction par Adrien P.)

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    Amis, Romains, Compatriotes !

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    Le noël de 1967 fut passé comme beaucoup d'autres dans la cabane à St Helen. Durant un nuit froide, Charlton fut réveillé par un télégramme de Peter Snell, un jeune producteur presque inconnu lui proposant de travailler ensemble sur une pièce de Shakespeare pour la télévision. Ils commencèrent à communiquer par lettre. Charlton voulait faire Jules César, et voyant que c'était de son nom qu'avait besoin Snell pour mettre en place le moindre contrat, il fut très clair sur sa volonté d'avoir un contrôle total du script, de devoir approuver tous les choix d'acteurs et de vouloir incarner Marc-Antoine lui-même.

    Quand Snell montra son idée à Commonwealth United, ils décidèrent qu'une telle propriété et  une star telle que Charlton Heston méritaient mieux que la télévision, donc ils commencèrent de sérieuses préparations pour en faire une adaptation au cinéma. Ils sentirent que ce ne serait pas du Shakespeare classique habituel, mais un spectacle à gros budget avec " M. épopée en personne", Charlton Heston. Au départ, Heston avait accepté de faire le film à la télé contre un cachet de 100 000 dollars et 15 pour cent des bénéfices. Il était tellement motivé à faire la pièce et à jouer Antoine qu'il accepta aussitôt de faire le film aux mêmes conditions.

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    Avec le nom d'Heston comme sorte de garantie, Snell se retrouva entouré d'une troupe d'acteurs notables : Robert Vaughn en Casca, Sir John Gielgud en César, Richard Johnson en Cassius, Richard Chamberlain en Octavius, Jill Bennett en Calpurnia, Diana Rigg en Portia et Orson Welles en Brutus. Chaque nom devait être approuvé par Charlton, mais il n'était pas du tout satisfait par le choix du réalisateur, Stuart Burge. Snell dut convaincre Heston, lui rappelant le film Othello de Burge et Olivier. Charlton n'était pas impressionné. Othello n'était rien d'autre que du théâtre filmé, mais il était déjà si attentionné avec Snell qu'il capitula, maintenant son contrôle sur toute la production.

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    PDVD_127.pngPDVD_383.png 

    Welles disparut alors mystérieusement, donc Snell offrit le rôle de Brutus à Jason Robards Jr. qui faisait alors Tora ! Tora ! Tora ! Il accepta et se retrouva à jouer un rôle pour lequel il n'était pas du tout taillé.

    Pendant les répétitions, Gielgud, probablement l'un des plus grands acteurs d'Angleterre, avait du mal à se rappeler de laisser de côté les répliques coupées. Il connaissait toute la pièce par cœur et continuait de naviguer le long du texte complexe. Heston dit gentiment à Burge : « je crois que John devrait récupérer toutes ses répliques ! » Ce fut le cas.

    Charlton se retrouva de nouveau à Madrid où les lieux et surtout les batailles pour Jules César allaient être filmés. Pendant les premières heures du premier jour du tournage, on n'avait pas besoin de Charlton, et il alla rapidement dormir sur un rocher pendant que Robards jouait la scène du suicide. Ainsi, au moment où ce fut son tour de commencer le tournage, il était éveillé et prêt. C'était tôt dans la soirée, mais Heston était frais et la tête pleine d'idées d'améliorations. Il appela Burge et Robert Furnival, qui avaient adapté la pièce en script, et suggéra de donner la dernière réplique de Lucilius (« comment meurt-il, Strato ? ») à Marc-Antoine. Il les convainquit que cette réplique mariée au dernier discours de Marc-Antoine amènerait un nouveau ressenti de la fin de la pièce. Les trois hommes approuvèrent la modification et firent ainsi.

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    Au programme des quelques jours suivants étaient les scènes de bataille impliquant 600 figurants, mais les prévisions météorologiques les obligèrent à revoir leur planning. Le soleil brilla un jour après et Heston, à cheval, suivi par des centaines de figurants à pied, prit sa position sur une montagne pétrifiée sous la direction du réalisateur de l'équipe secondaire, Joe Canutt. Les scènes furent tournées muettes, et tandis que les troupes embusquées d'Antoine chargeaient, la voix de Canutt lança le signal aux figurants en attente, « Acción, caballería, Acción ! » à chaque fois que la cavalerie chargeait, les figurants en attente qui devaient représenter les soldats pris dans une embuscade quittaient les rangs et fuyaient. Ils avaient été recrutés dans les villages alentours et malgré que le script leur disait de rester sur place, ils n'avaient pas l'intention de se faire décimer par la charge de la cavalerie romaine.

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    C'est pendant qu'ils étaient là que l'idée vint à Chuck de faire quelque chose qu'il avait toujours rêvé de faire.

    Il dit :

    «Je me souviens d'un jour en Espagne où je chevauchais vers le lieu de tournage avec Richard Johnson et Richard Chamberlain et où nous discutions de Shakespeare. Je leur dis que je trouvais qu'Antoine et Cléopâtre était idéal pour un film, et que Shakespeare avait même écrit sa pièce en cinquante scènes tout comme un film.

    J'ai commencé à décrire certaines de ces scènes en termes filmiques, des scènes que je jouais dans ma tête depuis vingt ans, depuis la première fois que j'avais joué la pièce à Broadway dans ma jeunesse. Eh bien, je ne sais pas si j'ai réussi à les convaincre, mais je m'étais clairement convaincu moi-même.

    Cette après-midi-là, nous en avons discuté avec Snell et avons décidé d'essayer

    En attendant, ceci dit, ils devaient toujours terminer Jules César dans les studios d'Elstree où le forum romain avait été recréé pour la fameuse scène des oraisons funèbres. Heston avait méticuleusement travaillé sur la façon dont devait être formulé le discours d'Antoine. Il le lut à Burge et Furnival qui lui servirent de foule.

    « Amis ! » cria-t-il. Un rire émergea de la foule. « Romains ! » La foule n'était plus intéressée. Il se jeta en avant, attrapant un des figurants. « Compatriotes, prêtez-moi une oreille attentive. » C'est comme ça qu'Heston voulait le jouer, et c'est comme ça qu'il l'a joué. Non pas qu'il voulait passer outre le réalisateur, mais il n'était pas parfaitement content de Burge. Quand ils étaient en train de filmer la dernière partie de son discours, Heston arriva à sa dernière réplique, « Quand reverrons-nous un autre comme lui ? ». La foule hurla.

    « Coupez ! » cria Burge assis à côté de sa caméra surélevée. Il regarda Heston, muet et incertain de ce qu'il voulait tout en sachant que cette scène n'allait pas. « Est-ce que j'ai fait quelque chose de faux ? » demanda plaintivement Chuck. Burge resta immobile, ne faisant que regarder Heston. Le silence commençait à devenir gênant. « est-ce que j'ai trop vite descendu les escaliers ? » demanda Chuck, suppliant pour avoir une réponse. « eh bien, ça ne ferait pas de mal que tu descendes un peu plus lentement, » répondit Burge.

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    Ils firent une autre prise, et Heston retourna à sa chaise, certain que ça s'était bien passé. Il fut soudain rappelé sur le plateau. Ils la refirent encore une fois, mais Burge cria « coupez ! » avant d'en être arrivé à la moitié.

    « Chuck, décale-toi un peu », cria-t-il. « Maintenant, tout le monde se presse contre lui. Remonte d'une marche. Maintenant, quand Chuck parle de la volonté, je veux que vous deveniez tous une foule très dangereuse et menaçante. » Burge avait trouvé ce qui le gênait. C'était la foule, pas Heston, mais Charlton était content de sa propre performance, et ça l'agaça que son réalisateur n'ait pas été capable de dire ce qui ne lui plaisait pas.

    C'est pendant qu'il faisait Jules César qu'un journaliste lui demanda : « est-ce que vous aimeriez un jour être réalisateur ou producteur de film ? » Il répondit : « Non, absolument pas. Je vis très bien sans devoir diriger les choix d'acteurs, de script, de dessin et compagnie. » Il était aussi capable de faire plus sur le plan artistique que son travail d'acteur. Il avait de l'autorité et plus de pouvoir que le producteur ou le réalisateur. Quand il entendit qu'ils songeaient à renommer le film L'Assassinat de Jules César, il rétorqua : « j'ai accepté de faire le Jules César de Shakespeare, et il restera ainsi. »

    Tandis que la production touchait à sa fin, Heston et Snell commencèrent à travailler sur les préparatifs pour Antoine et Cléopâtre presque comme une suite à Jules César avec Chamberlain reprenant son rôle d'Octave, mais le gros du travail était encore le montage de César. Quand il rentra à la maison, Charlton envoya une lettre détaillée à Burge explicitant plan par plan la façon dont il voulait que sa scène d'oraison soit montée, incluant des détails de doublage de la foule.

    Quand Heston vit le résultat final, il n'était pas satisfait. Il avait espéré que la pièce se suffisait à elle-même, mais d'après lui, l'interprétation de Robards et la réalisation étaient deux énormes défauts, et il fut déterminé à laisser la réalisation de sa propre production d'Antoine et Cléopâtre au meilleur réalisateur Shakespearien disponible, ce qui limitait le choix à seulement deux hommes : Orson Welles et Laurence Olivier.

     

    Maintenant Plus qu'Un Acteur

     

    L'île hawaïenne de Kauai aurait pu être le paradis parfait dans lequel Charlton aurait pu passer son temps à faire un script pour Antoine et Cléopâtre. Et c'est effectivement là-dessus qu'il passa le plus clair de son temps libre tout en admirant la mousse couleur lavande sur le sable et le soleil miroitant sur l'océan. Dans une certaine mesure, il avait cependant de la rancune de voir son temps pris pour le tournage de Le Maître des îles, un film qu'il n'avait pas envie de faire mais dont il espérait gagner de l'argent plus que nécessaire pour financer son propre rêve.

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    C'était ironique qu'il soit là à jouer ce film qui devait être la suite de Hawaï. Après tout, il avait rejeté le rôle que joua Richard Harris dans le premier film, et maintenant il était là, à jouer le fils d'Harris devenu maître des îles. Tom Gries était de nouveau le réalisateur, mais le flair dont il avait fait preuve dans Will Penny, le solitaire avait décliné.

    Ce fut un soulagement de finir ce film et retourner au travail bien plus gratifiant, quoique bien plus frustrant d'adapter Antoine et Cléopâtre à l'écran. Il commença à songer à de nombreuses actrices pour le rôle de Cléopâtre parmi lesquelles Anne Bancroft, Glenda Jackson et Irene Papas, mais il était incapable de se décider. Beaucoup de partenaires financiers, parmi lesquels de gros studios, avaient exprimé leur intérêt pour cette entreprise quoiqu'en 1969, il commença à penser que c'était comme si personne n'allait lui fournir l'argent dont il avait besoin. Sa frustration augmentait tout comme la fréquence des terribles migraines dont souffrait maintenant Lydia.

    Il alla voir Olivier et Welles pour leur proposer d'être son réalisateur, mais aucun des deux hommes ne pouvait – ou voulait – être le premier à réaliser une adaptation filmique d'Antoine et Cléopâtre. C'était un nouveau coup dur pour Charlton. Quand il avoua à Welles qu'il n'avait encore trouvé personne pour incarner Cléopâtre, Welles lui dit : « si tu ne trouves pas une grande Cléopâtre, tu ne peux pas faire cette pièce, mon garçon. » C'était le meilleur conseil qu'on aurait pu lui donner.

    Il en vint également à la conclusion que s'il faisait le film selon ses propres règles sur tous les plans, autant qu'il le réalise lui-même. Peter Snell me dit :

    «Chuck réalisa Antoine et Cléopâtre parce qu'il ne trouvait pas de réalisateur disponible. Il dit : « Mon dieu, je connais tellement bien la pièce que je vais essayer de la réaliser avec l'aide d'un bon cameraman. »

    Il fit un travail de réalisation dont il peut être fier pour ce film. Contrairement à la plupart des gars qui ont tenté de se diriger eux-mêmes et n'ont pas vraiment réussi, Heston n'a jamais voulu être réalisateur. Il se retrouva cependant dans une situation où le seul moyen pour lui de voir ce film fait était de le réaliser lui-même.

    Chuck trouva enfin le temps d'auditionner des actrices. Les deux qui l’impressionnèrent le plus qui étaient disponibles furent Hildegard Neil et Barbara Jefford. Il alla exprès à Londres pour filmer des séquences tests avec elles.

    Hildegard se souvient de son audition pour Cléopâtre :

    «Chuck m'a dit qu'il cherchait depuis longtemps une Cléopâtre. Il était dans les préparatifs depuis un an environ et avait visiblement songé à beaucoup de monde, mais quand on s'est rencontré (en hiver 1970) il en était encore à la phase de recherche. Je jouais alors Hélène de Troie au Aldwych Theater, et je crois que Chuck avait vu une de mes performances et avait griffonné mon nom dans un coin.

    Quelques mois plus tard, mon agent me téléphona et dit : « nous allons rencontrer Charlton Heston au Dorchester dimanche. » Il ajouta que c'était à propos de Cléo. J'ai décidé de regarder tout cela comme une idée tirée par les cheveux, mais je me suis activée parce que je me suis dit que ce serait très intéressant de le rencontrer.

    Il vint à ma rencontre à l'entrée, un grand homme large et massif. On s'est très bien entendu et avons discuté pendant plus de deux heures. Je pensais ne rester que dix minutes.

    Il a ensuite vu une de mes pièces à la télévision, "A Casual Affair", et il s'arrangea pour revenir dans le mois pour faire un test pendant deux jours. Je considérais cela comme une fin en soi d'avoir le privilège de jouer ce rôle charmant, ou tout du moins un extrait, avec Charlton Heston dans le rôle d'Antoine.»

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    Le jour après son essai avec Barbara Jefford, Chuck amena Hildegard à dîner au Dorchester. Elle fit quelques remarques sur la façon dont sa bouche se tordait dans les gros plans, et il la ragarda et lui dit : « tu ne dois pas parler de la sorte de ma Cléopâtre. »

    Avec ses séquences d'essai prêtes à être montrées aux studios, Charlton devait retourner au travail plus routinier d'acteur.

    C'était une façon étrange de commencer un film ; tôt un dimanche matin dans les rues désertées de Los Angeles avec Heston marchant seul en ayant l'impression d'être le dernier homme sur terre, ce qui était exactement le sentiment qu'il devait ressentir.

    Il faisait Le Survivant1 dans lequel il joue littéralement le dernier humain normal sur la surface de la terre, tout le monde ayant été transformé en des créatures de la nuit (quelque chose comme des zombies ou des goules). Basé sur le livre Je suis une légende, c'est un thriller d'horreur-science-fiction que Charlton avait depuis longtemps envie de faire, et même quand toute son attention était consacrée à la préparation d'Antoine et Cléopâtre, il était également très actif sur la production de Le Survivant.

    Il dit :

    «Orson Welles m'en avait prêté une copie et j'ai été fasciné, mais nous faisions un autre film à ce moment-là, et nous fûmes ensuite impliqués dans d'autres projets. Par la suite, plusieurs années plus tard, quand je faisais un film avec Walter Seltzer, nous devions rassembler de nouvelles idées. Je me suis souvenu du livre que Welles m'avait donné. Je savais qu'il était quelque part chez moi, mais impossible de remettre la main dessus.

    J'ai dit à Walter que j'étais certain que le titre était "Mon nom est légion"2. Walter était alors à Londres et dit qu'il irait l'acheter chez Foyle's bookshop et qu'on pourrait en parler plus tard. Quand je suis arrivé à Londres quelques jours plus tard, je lui ai demandé s'il l'avait lu.

    Il me dévisagea d'un air suspicieux et me demanda : « tu es sûr que c'est le bon livre ? »

    "Mon Nom est Légion" s'avéra être un gros volume épais de statistique sur la population !»

    Le bon livre, "Je suis une légende", fut finalement trouvé, Charlton et Seltzer le présentèrent à Warner qui accepta de le financer. Il était réalisé par Boris Sagal, un personnage plutôt lunatique, et quand il y avait un problème entre lui et le cadreur Russell Metty, c'était à Heston de calmer les choses.

    Pour lui, il n'y avait plus rien qui ressemblât à la « routine de l'acteur ».

    C'était l'idée d'être le dernier homme sur terre qui plaisait le plus à Heston.

     

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    Imaginez pouvoir aller faire vos courses dans un magasin rempli à ras bord et juste prendre ce que vous voulez, ne plus avoir à faire la lessive parce que quand une chemise est sale, il suffit d'en prendre une nouvelle.

    Ne pas seulement avoir tous les whiskys de quarante ans d'âge à ranger dans son bar, mais aussi les trésors des musées d'art à accrocher à ses murs.

    Pour pouvoir filmer les scènes de rues désertes que nous avons filmées un dimanche matin dans le quartier financier de Los Angeles, qui est déjà assez désert quand c'est tôt le matin, il a bien sûr fallu demander à la police de bloquer les rues environnantes.

    Une partie de la séquence se passe sur une autoroute déserte. Nous avons utilisé pour cela une nouvelle autoroute qui n'avait pas encore ouvert. Mettez quelques voitures vides avec les portières ouvertes et ça donne un effet très inquiétant.

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    Il pense qu'il y a une morale dans ce film, similaire à celle de La Planète des singes. « Je suppose que c'est l'homme qui est un animal dangereux, peut-être le plus dangereux de tous, » dit-il.

    Le film fut un succès, et talonnant de près La Planète des singes et Le Secret de la planète des singes, il était soudainement considéré comme une figure culte parmi les fans de science-fiction, mais ce ne fut pas longtemps avant qu'il ne soit de nouveau en costume – et ravi de l'être.

    1The Omega Man, Omega signifiant la fin en grecque (NDA)

    2My Name is Legion

  • 26 - "Charlton Heston une biographie " de Michael Munn - (traduction par Adrien P.)

     

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    Un Succès singé

    Souvent, rien ne soulage plus la perte d'un être cher que le dur labeur, et Charlton avait la chance d'avoir un film à faire pour se ressaisir. C'était La Symphonie des héros1, un drame de guerre dans lequel il incarne un chef d'orchestre en tournée avec son orchestre dans une Europe déchirée par la guerre. Quand l'orchestre est capturé par les Allemands, Heston se retrouve à mener une bataille d'esprit avec leur ravisseur brillamment joué par Maximilian Schell.

    Charlton a été formé à diriger un orchestre par Léo Damiani pendant deux mois, et Heston dit que ce qui l'intéressait dans ce film était précisément le défi de devoir apprendre à être chef d'orchestre :

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    (Leo Damiani)

    https://www.google.com/search?q=leo+damiani&source=lnms&tbm=isch&sa=X&ved=0ahUKEwjt47_FvLDgAhVRJlAKHWKWBLYQ_AUIDigB&biw=1366&bih=626#imgrc=h9POXhmYr3b-YM:

    «Mon goût a toujours penché pour la musique, mais comme on l'apprend rapidement, diriger un enregistrement de Beethoven à une heure du matin chez soi, n'est pas pareil… ce n'est pas comme ça qu'ils font.

    Le fait que je sois musicalement illettré rendit la tâche compliquée. Un chef d'orchestre doit connaître la partition par cœur, et on ne peut pas apprendre une partition symphonique sans être vraiment capable de lire les notes. Heureusement, il restait du temps avant le début du tournage et nous avons réussi à trouver une solution à chacun de ces problèmes.

    Je dirai sincèrement qu'apprendre à faire semblant d'être chef d'orchestre fut la préparation la plus difficile que j'aie jamais faite pour un film.»

     

    Il sortait de chaque session d'entraînement couvert de sueur, mais il apprit ainsi à diriger la cinquième symphonie de Beethoven (ou du moins une partie), Le Lac des cygnes et un peu de Brahms.

    Début 1967, après avoir fini La Symphonie des héros, il fut convoqué à Washington où le président L. B Johnson le nomma personnellement au National Council of the Arts. C'était une responsabilité supplémentaire qu'il promit d'endosser du mieux qu'il pouvait bien qu'il portait déjà le poids de la présidence de la Screen Actors Guild et était lourdement impliqué à ce moment-là pour bloquer le plan proposé d'amener des touristes sur les plateaux en plein tournage.

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    Avec tant de choses se passant en même temps, il est surprenant qu'il ait trouvé le temps de jouer, mais il avait les yeux rivés sur un petit western pas comme les autres, Will Penny, le solitaire2. Il explique :

    «Le script me fut apporté par Walter Seltzer, je le lus et j'eus envie de le faire aussitôt. J'ai supposé que l'homme qui l'avait écrit, Tom Gries, était un historien ou une figure éminente de l'histoire de l'Ouest, mais il s'avéra être un auteur amateur qui n'avait jamais écrit de western. J'ai dit à Walter que le projet pourrait intéresser Wyler ou Georges Stevens, mais il me dit qu'il y avait un os. L'auteur voulait réaliser le film lui-même.

    Je lui ai demandé ce qu'il avait réalisé auparavant : rien du tout, dit Walter. Le script était cependant tellement bon et j'avais tellement envie de le faire que nous avons fini par céder

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    Lydia face à Chuck dans "WILL PENNY LE SOLITAIRE"

    C'est le nom d'Heston qui convainquit Paramount de soutenir le film, et le tournage commença à Bishop, en Californie. Lydia offrit ses services juste pour une journée dans un petit rôle tandis que le rôle féminin principal revint à Joan Hackett dont le talent et le professionnalisme ravirent Heston. Malheureusement, Joan Hackett est maintenant partie, sans avoir exploité tout son potentiel d'actrice de marque.

    Donald Pleasence jouait le méchant au cœur noir du film et sembla remarquer que beaucoup de ses scènes furent coupées par déférence pour Charlton Heston, mais il a une histoire amusante à raconter :

    «Je jouais un homme sauvage, un fou qui tirait sur tout le monde, avait une maîtresse et torturait Charlton Heston. À la fin, Heston m'abat avec un fusil à canon scié, me faisant valdinguer plusieurs mètres en l'air. Après que nous avons fait cette scène, Heston me dit : « ça t'apprendra à t'en prendre au personnage principal. »

    Ce qui attira vraiment Heston dans ce film, hormis la qualité du script, était son authenticité. Il dit :  

    «Will Penny, le solitaire est le contraire de L'Homme des vallées perdues3 en terme de protagoniste, mais son environnement avait le même réalisme. Penny n'est pas un mythique héros de western avec une peau de daim dorée, un chapeau couleur fauve, plusieurs pistolets et un cheval alezan bien pouponné.

    Je porte un chapeau trentenaire déchiré, une moustache en guidon de vélo et des jambières en cuir que j'avais volées d'un précédent film et que j'avais gardées au fond du placard. Je ne chevauche pas un cheval bien bichonné mais un qu'on laissa volontairement dans un enclos en extérieur pour qu'il ait un pelage d'hiver.

    Sur place, où tout est nécessairement plus éloigné comme l'assistante du réalisateur, la perche du micro  et le cameraman, on est dans un environnement complètement immersif, et il est plus simple de remplir une des missions de l'acteur qui est de se persuader que les circonstances de l'histoire donnée sont réelles. Je pouvais bien mieux le faire en chevauchant dans la poussière provoquée par un millier de têtes de bétail dans l'Orange River Valley où nous tournèrent Will Penny le solitaire, que je ne l'aurais pu sur les plateaux totalement « réalistes » que l'on construisait dans les studios d'enregistrement.»  

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    Donald Pleasence, Anthony Zerbe, Bruce Dern. 

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    (Lee Majors) 

    Will Penny, le solitaire, l'histoire d'un cow-boy vieillissant qui pense être trop vieux pour changer même par amour, reste un des chouchous d'Heston. Il me dit également que c'était l'un des deux seuls films dont il se souvienne (Khartoum étant le deuxième) pour lequel le script fut à peine modifié.

    C'est en faisant Will Penny, le solitaire que Charlton, se laissant convaincre par son camarade à l'affiche Bruce Dern, se mit à la course pour rester en forme. Il détesta ce coureur-professionnel-devenu-acteur depuis lors, dit-il en plaisantant, mais depuis, courir est devenu une habitude quotidienne.

    Comme cela arriva si souvent aux projets qui lui tenaient à cœur, le film fut un échec malgré les critiques positives. Heston blâme les distributeurs qui ont soudain projeté le film à l'inauguration d'un théâtre à Londres, sur un écran installé à la hâte. Personne ne savait que c'était là, et Paramount décida finalement de l'intégrer dans une double séance avec un film de Tarzan pour enfants qui n'étaient pas le public ciblé par ce film.

    Heston n'avait plus eu de succès inconditionnel depuis Le Cid, et il désespérait d'en trouver un. Il travailla en réalité en silence en arrière-plan d'un film qui sera en fin de compte exactement ce qu'il cherchait.

    « Je veux trouver quelque chose comme King-Kong, » dit le producteur Arthur P. Jacobs. En fait, il demandait à tous les agents littéraires du coin s'ils avaient quelque chose pour lui. Un agent français l'appela alors et lui dit : « j'ai quelque chose pour toi qui est tellement bizarre que je ne pense pas que tu puisses le faire. » Il continua en racontant le récit du roman La Planète des singes de Pierre Boulle, une histoire où les singes sont les maîtres et les hommes sont les bêtes.

    Jacobs était extasié devant l'idée. « je l'achèterai, il me le faut, » cria-t-il.

    « je pense que tu es fou, mais d'accord, » lui dit l'agent.

    Jacobs passa les trois années et demi suivantes à tenter de convaincre un studio de le faire en montrant des croquis des singes qu'il avait commandés, mais chaque studio disait « pas possible ». « j'ai ensuite demandé à Rod Sterling de rédiger le script, » explique Jacobs, « et je suis retourné voir tout le monde : refus catégoriques. Je me suis alors dit que peut-être que si j'avais un acteur… je suis allé vers Heston qui accepta dans l'heure. »

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    Jacobs avait trouvé de l'or, car comme l'expliqua Heston, « j'étais fasciné par l'idée vu son évident potentiel commercial. J'ai donc dit à Arthur ce que je dis rarement pour un projet qui n'est pas encore bien financé, que j'étais prêt à le faire. »

    Charlton suggéra que Frank Schaffner serait le réalisateur idéal et Jacobs réussit à le convaincre lui aussi. Il retourna alors auprès des studios. Chez Fox, l'attention de Richard Zanuck fut attirée, mais il dit : « c'est très bien tout ça, mais qu'est-ce qu'on fait si les gens rient à cause des costumes ? Jacobs convainquit Zanuck de les laisser filmer une tentative avec Heston et Edward G. Robinson dans le rôle du singe Zaius. Le test montra que Jacobs avait raison et que les singes n'étaient pas risibles, et Fox leur donna le feu vert bien que le tournage ne commença qu'un an après le test, à Page, en Arizona.

    Twentieth Century-Fox est l'un des studios préférés d'Heston bien qu'il n'y ait travaillé qu'en de rares occasions. Jugeant comment le studio géra les Singes, il dit, « j'aime la façon qu'ils ont de travailler chez Fox. » il continue :

    «Je pense que Richard Zanuck mérite une grande part de crédit pour le fait que Fox a financé le film car il examina attentivement le projet et les coûts énormes qu'il impliquait. Zanuck avait une grande confiance en Franklin Schaffner, tout comme moi, non seulement comme réalisateur plein de créativité, mais également comme un bon capitaine.

    Frank et moi avons travaillé plusieurs fois ensemble et avons de bonnes relations. Je pense que nous envisagions de la même manière le projet et tout sembla se mettre en place très efficacement. Les problèmes majeurs dans la création du film s'avérèrent surtout d'ordre technique. Les problèmes créatifs allaient sûrement se régler d'eux-mêmes.

    Il y a peu d'histoires de science-fiction qui laissent la moindre place pour l'évolution du personnage. Les tentatives désespérées de Taylor pour communiquer quand il est momentanément incapable de parler est un merveilleux défi pour un acteur. Je dois dire que ce fut l'un des rôles les plus physiquement douloureux que j'ai fait puisque j'étais battu à coup de bâton ou de pierres presque dans chaque scène, ou alors traîné avec une laisse autour du cou ou aspergé à la lance à eau quand je ne tombais pas d'une falaise.»  

    Ce film inaugura également sa toute première scène nu. La nudité ne laisse pas indifférent Heston. Il dit :

    «si on le fait seulement pour montrer un corps nu, je crois qu'on rate l'objectif. La nudité doit être utilisé avec grande sélectivité autant que de sensibilité, mais il y a parfois une remarque pertinente à faire à travers la nudité. Le genre d'idée que nous développons dans les Singes durant la scène dans la salle du trône où Taylor est dénudé pour montrer que ça n'a aucune importance pour les singes, pas plus que de retirer le collier d'un chien. Je défie quiconque de trouver un meilleur moyen de montrer ce que les singes ressentent envers les humains que de le voir dénudé et se tenir debout entièrement nu.

    Il y a eu une étrange erreur de parcours dans le tournage de cette scène où les trois juges font le tableau « ne voient pas le mal, n'entendent pas le mal, ne disent rien de mal. » On peut justifier tous les autres clichés employés par les singes car leur culture est une imitation d'une autre, leur faisant logiquement employer les clichés langagiers, mais il n'y a aucun moyen de justifier ça : c'est faux.

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    Quand nous tournions la scène, Frank dit : « ce serait terriblement drôle d'avoir une prise où ils le font. » On en a ri, et il ajouta « non, ça ferait tâche, je ne devrais pas faire ça. » Je dis : « pourquoi ne pas en faire une pour la forme, » et il répondit « très bien. » On l'a fait, on a ri, et tout le monde trouva cela merveilleux, mais il ne voulait pas le garder au montage.

    Mais alors, sans savoir pourquoi, la prise finit dans le premier montage et tous les échelons du studio le virent et dirent, « non, ne change rien ! » ils eurent un premier pré-visionnage, et ce fut un énorme succès. Alors voilà.»

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    Le film fut un succès immédiat, et Fox, certain qu'il n'y avait pas de meilleur affaire qu'une affaire de singes, se prépara pour une suite, ce qui terrifia Heston. Résistant à tout prix à tous les efforts pour qu'il y joue, il se concentra sur une pièce à la télévision, Elizabeth and Essex, à la fin de l'année 1967. Bien sûr, il incarnait Essex, aux côtés de Dame Judith Anderson en Elizabeth. Ce fut un prestigieux spectacle, réalisé par George Schaefer qui remporta un Emmy Award.

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    Judith Anderson et Chuck dans ELIZABETH AND ESSEX

    Pendant ce temps, Fox était inflexible en voulant répéter son succès et un script fut pondu pour Le Secret de la planète des singes.

    Ce fut le premier film dans lequel Heston fut impliqué qu'il ne voulait vraiment pas faire.

    Il explique :  

    «Je me sentais en quelque sorte redevable envers Richard Zanuck. Le premier avait été un tel succès à la fois critique et commercial, et j'étais si reconnaissant du rôle et de la récompense matériel qu'il m'avait apportée. Ils vinrent me parler d'une suite aussitôt que l'écrasant succès devint indéniable. Je répondis : « vous savez, il n'y a pas de suite. Il n'y a qu'une seule histoire. Il peut y avoir d'autres péripéties parmi les singes, ça peut être un film divertissant, mais sur le plan créatif, on n'a rien qui ressemble là à un film. »

    Maintenant, comme je l'ai dit à Zanuck, ce commentaire n'était nullement destiné à les critiquer. Un film qui engrange vingt-deux millions de dollars, qui a le potentiel de faire l'objet d'une ou plusieurs suites donne évidemment une responsabilité vis-à-vis des actionnaires et tous les autres membres de l'industrie du cinéma comme vous, qui gagnent de l'argent grâce aux profits du film.

    C'est sûr que sur le plan de l'histoire, le premier est le seul à en avoir une. Néanmoins, je me sentais redevable envers Zanuck et lui dit que je serais heureux de le faire comme un service à un ami 

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    LE SECRET DE LA PLANETE DES SINGES avec James FRANCISCUS et Charlton HESTON

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    En acceptant de faire le film, il leur fit promettre de le tuer à la fin du film pour qu'il ne puisse absolument pas réapparaître dans une quelconque suite à venir. Ils acceptèrent et il leur donna même l'idée de faire exploser toute la planète, croyant probablement que cela mettrait fin à la série une bonne fois pour toute.

    Fox était rusé, cependant. Ils réussirent quand même à faire encore trois suites et une série télévisée.  

    Charlton Heston ne s'était plus autant amusé d'un gros titre sensationnaliste depuis qu'un torchon italien criait fort « Les Poux de Michel-Ange. » Cette fois, c'était un magazine people américain qui titrait avec une intensité choquante « Charlton Heston : la scène d'amour NUE qui est allée  trop loin ! » Non : pas l'homme qui a peint la chapelle Sixtine, suppliait ingénument le magazine. Pas le président de la Screen Actors Guild. Pas Charlton Heston !

    Ils ont suggéré que ce devait être Kirk Douglas. Non, ils démentirent eux-mêmes leur propre révélation choquante. C'était vraiment Chuck Heston. Wow, quel scandale !

    La scène était pour un film sur un footballeur vieillissant, Number One, dans lequel Heston partageait le lit avec l'actrice Jessica Walter. C'était en tout bien tout honneur : elle jouait sa femme. Évidemment, quelqu'un parmi le département communication, certain que personne ne trouverait un film sur le football américain aussi sensationnel qu'un film dans lequel Heston a une scène au lit, couvrit les bureaux de la presse à scandale des photos les plus langoureuses d'Heston et madame Walter, puis les invita à rencontrer les deux vedettes dans les studios.

    Heston obtempéra scrupuleusement, acceptant de parler de sa scène de nu. À la grande déception des journalistes, il dit : « ce ne sont pas vraiment des scènes nues. Nous étions habillés. Là, je vais vous montrer. » Il montra une photo de lui et Jessica allongé dans un étreinte passionnée. « vous voyez, rien qui ressemble à une poitrine dénudée. Ce sont des scènes extrêmement sensuelles, mais c'est le visage de Jessica, pas la nudité, qui donne cet effet. »

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    NUMBER ONE (photo Cinémonde 1969)

    L'affaire une fois éclaircie, la presse people essaya encore de trouver quelque chose à se mettre sous la dent avec la rumeur qui courait selon laquelle Charlton Heston était vraiment nu. Ils ne semblaient clairement pas intéressés par le fait de faire savoir à leur lectorat ce qui avait vraiment décidé Heston à faire Number One.

    Cela arriva en 1963 tandis qu'Heston lisait un article sur la vie d'un quarterback. Un film commença à prendre forme dans sa tête. Avec le soutien et l'intérêt de Walter Selzter, il contacta Richard Zanuck qui accepta de payer pour qu'un synopsis soit rédigé. Charlton et Walter étaient contents depuis qu'ils avaient commencé avec Le Seigneur de la guerre à utiliser leur propre argent dans la rédaction de scripts. Mais quand le père de Dick, Darryl F. Zanuck, toujours actif chez Fox, a vu le synopsis, il le rejeta aussitôt. United Artists reprit finalement le projet en promettant à Heston une part des revenus mais pas d'avance financière, donc si le film était un échec, il était possible qu'il n'en tire aucun profit. Ce n'est que vers fin 1968 que le tournage commença enfin sous la direction de Tom Gries.

    Pour se préparer pour son rôle de quaterback, Heston passa des semaines à s'entraîner avec les entraîneurs de l'USC Craig Fertic et Marx Goux. Il se blessa le dos, eut de terribles crampes aux jambes, se froissa un muscle de l'abdomen et, durant le vrai tournage, s'est fêlé une côte quand un footballeur de 100 kilos le chargea. Tandis qu'il était allongé à se tordre de douleur, le footballeur se pencha sur lui et lui dit, « bienvenue dans la ligue national de football américain ! » drogué de médicaments et les côtes bandées de près, Heston retourna sur le plateau de tournage le lendemain pour tourner un match de football.

    Personne parmi les journalistes ne s'intéressait cependant à cela, pas plus que le public allant au cinéma. Le film fut un échec en Amérique, et fut à peine regardé ailleurs dans le monde. Et la scène d'amour ? Coupée au montage !

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    1Counterpoint

    2Will Penny

    3Shane