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" CHARLTON HESTON STORY " Cinémonde N° 1616 du 7 septembre 1965 Episode 1

Enfin ! Je retrouve sur EBAY ou d'autres SITES, les journaux de ma jeunesse que j'ai malheureusement perdus....

Aujourd'hui, j'ai reçu CINEMONDE - N° 1616 du 7 septembre 1965, dans lequel commence le récit de la vie de Charlton Heston, jusqu'en 1965. La "STORY" est à suivre....

Je vais me procurer les numéros suivants, car je tiens à publier l'intégralité de ce récit en français, ce qui est tellement rare.

img369.jpg   1 - UN PETIT GARS AUX NERFS D'ACIER

                                                            

Il n'y a aucun mérite à être plus grand que les autres. Même dans un pays où la moyenne est singulièrement élevée. Mesurer 1m98  (1), pourtant, cela aide à porter l'armure du "Cid" ou "Les Tables de la Loi". D'autant plus que, mince comme une lame, Charlton Heston s'est taillé et poli dans l'acier. Il s'est mesuré, bien plus par préférence que par hasard, aux personnages les plus denses, les plus lourds de signification, les plus écrasants de tous les temps. On mobilise maintenant les milliards et toutes les ressources de la technique pour faire revivre en lui Michel-Ange. Mais seul, mains nues, mains vides, il s'est colleté hier avec Hamlet ou Jules César. 

Son métier, que tant d'autres prennent pour excuse facile à des complaisances, des écarts de caractère,  les désordres de leur vie privée, a été pour lui une école de stricte discipline. Il tourne plus que les autres, des films plus longs et des rôles plus pénibles, et entre les films il doit maintenir une forme sans défaillance. Quinze ans de succès lui ont rapporté une fortune elle aussi solide.  Il y a puisé un autre enrichissement. Ses perpétuels voyages autour du monde, le hasard des cadres choisis pour ses films qui le font vivre des mois en Italie, en Espagne ou au Pérou ont fait de lui un citoyen du monde. Il en connaît les problèmes. Il ne prétend certes pas les résoudre, l'épée de Rodrigue y serait impuissante et Moïse prêche dans le désert. Mais puisque sa haute taille attire les regards, puisqu'il est célèbre, riche et admiré, il s'est proposé et s'efforce d'être, par ce qu'il incarne à l'écran, un héros exemplaire sur lequel la dignité de sa vie personnelle et quotidienne ne jette aucune ombre.

C'est en cela que ce gaillard de près de deux mètres, champion des rôles de taille et de poids, est surtout un grand bonhomme. 

(1) - Une petite erreur de l'auteur- Charlton Heston mesurait 1m93

 

 

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Il est né au milieu des bois, à l'automne, le 4 octobre 1923. Son père était garde forestier, dans les immenses forêts qui s'étendent sur la rive gauche du Michigan. Un chalet de bois, à deux heures du premier village. La maison était gardée par d'énormes chiens car, les nuits d'hiver, on entendait hurler les loups. 

C'est là qu'il a grandi. 

Depuis qu'il est célèbre, on s'est avisé de rechercher ses lointaines origines, en Ecosse. On a dit — pourquoi pas, après tout, cela l'amuse et ça le flatte —  qu'on trouve trace de sa famille jusque sous Jean-sans-Peur. Un certain Douglas-le-Noir, dont on ne dit pas s'il était chevalier ou brigand, était un ferrailleur redoutable. Plus qu'à cet ancêtre romanesque, il se sent lié par des racines profondes aux émigrants qui, vers la fin du siècle dernier, arrivaient par pleins bateaux d'une Angleterre avare et dure aux petites gens. Ses grands-parents maternels venaient d'Ecosse. Des gens d'un certain rang, fiers de leur origine française. Ils s'appelaient Frazer corruption de "Fraisier", plante noble qu'on trouve avec son symbole : " goutte de sang vif, toujours prêt à couler, ténacité, endurance " dans les blasons et les mille fleurs des tableaux de primitifs.

Mais ses grands-parents paternels venaient tout droit des charbonnages. Le vieux Carter (1) avait été mineur de fond, comme tous les hommes de la famille. Il commençait à trouver amer le pain qu'il gagnait, aussi noir que la terre à laquelle il fallait l'arracher. Quand son père fut tué dans un accident, par trois cents mètres de fond, Carter, rescapé par miracle, se joignit à la foule des pauvres diables qui s'en allaient, à l'aveuglette, vers un pays qu'on disait neuf et riche et plein de promesses. Dès qu'ils débarquaient, ils étaient rejetés par ceux qui s'étaient installés tant bien que mal dans les villes de la côte, et qui déjà montraient les dents. Les plus faibles croupirent dans une misère pire que celle qu'ils avaient fuie. D'autres, serrant les poings, acceptèrent d'aller plus loin. L'ancien mineur comprit qu'il fallait s'attaquer au plus difficile. C'était le plus sûr, le plus rapide moyen de s'en sortir. A moins, d'y laisser la peau. 

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(1) Carter est le véritable nom de Charlton Heston. Sa mère lui a fait porter le nom de son nouveau mari, HESTON, quand Chuck avait 13 ans.

LE MEME GOUT DU RISQUE

En ce temps-là, sur les rives sauvages des Grands Lacs, les forêts étaient plus épaisses encore qu'aujourd'hui. On y traquait le lynx, on y piègeait le castor et l'opossum et presque tous les jours il fallait faire le coup de feu contre l'Indien. Les terribles blizzards du long hiver, les sécheresses des étés torrides avaient découragé nombre de pionniers et leurs terres à demi défrichées restaient à l'abandon. Le vieux Carter offrit de payer les impôts en retard sur ces landes et ces bois déserts. Il se tailla ainsi un vaste domaine qui n'était pas absolument imaginaire, mais qui, pas plus que Douglas-le-Noir, n'appartenait à une réalité très concrète. La fortune et les titres, Charlton Heston devrait se les gagner lui-même. 

D'ailleurs, avant même d'avoir pu s'y attaquer vraiment, le vieux Carter perdit au jeu les terres que les incendies de forêt n'avaient pas dévastées. Cet audacieux, violent, obstiné, difficile à vivre, avec des emballements subits, des rancunes tenaces, garde une place de faveur dans le coeur de son petit-fils qui l'a à peine connu. 

Car le fils de l'ancien mineur, jeté dans la solitude du Michigan, s'était modelé dans une austère âpreté. Le jeune Chuck est élevé à la dure école de la nature qui ne pardonne ni au faible ni au poltron. Il ne connaît que sa forêt, les camps de bûcherons, dans leur fauve odeur de sève, de sueur, d'écorce et de fumée ; les pistes invisibles qui, à travers fourrés et rochers, mènent tout droit au terrier du renard, au repaire du porc sauvage, au nid du grand hibou ; les frissons de l'eau dans le torrent ou sur le lac, trahissant le glissement de la truite, le sillage du brochet vorace. Un gamin élevé librement apprend vite à grimper, à courir, à tirer, à pêcher. Il se fait des muscles, des poumons, des nerfs d'acier en s'essoufflant pour manier la lourde cognée d'un bûcheron, en traversant des ruisseaux glacés, en affrontant des bêtes. Il apprend aussi à aimer celles-ci, à les connaître. Il voudrait retenir la courbe gracieuse d'une attitude, le déclic d'un essor, l'éclair d'un pelage furtif. C'est ainsi qu'il commence à dessiner. 

Il étudie aussi, sans compagnons, sans maître, penché sur ses livres dans la chambre sans feu où parfois l'encre gèle au fond de l'encrier. Son père est sévère et frugal, et pour son fils ne veut que des nourritures saines, pour l'esprit comme pour le corps. Abreuvé d'eau claire et de lait, celui-ci est nourri aussi de fortes lectures.

— Jusqu'à l'âge de dix ans, dit Charlton Heston, je n'ai connu d'autre livre que la Bible, que mon père ouvrait le soir et me faisait lire sous la lampe, suivant les lignes avec son doigt. 

L'enfant épelle les noms difficiles et innombrables de l'Ancien Testament, s'étonne des prophéties et des prodiges sans se douter qu'il prêtera un jour son visage au plus grand des personnages du Livre. 

M. G.

( A suivre...)

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